Trimes est heureux de vous présenter Nicolas Hemet. Figure bien connue dans le milieu français. Souvent chez trimes, on dit qu’il y a deux types d’organisateurs, ceux qui souhaitent sans cesse améliorer leurs courses et qui sont réceptifs et les autres qui ne veulent rien savoir des autres. Chez les athlètes de haut niveaux amateur, cette analogie fonctionne aussi. Il y existe des individus qui essayent de tout garder pour eux et il y a ceux qui partagent et qui font du sport avant tout pour eux. Nicolas faisant parti de la deuxième catégorie, Trimes a décidé de profiter de son savoir et d’en savoir plus sur sa dernière participation à Kona surtout que sa performance reflète les réalités des vrais AGs. En espérant que tout cela puisse être contagieux!
Félicitation pour ta course. À moins que je me trompe mais c’est ta première année où tu es coach à temps plein. As-tu l’impression que ce statut te met une nouvelle pression dans le sens que le maitre doit prouver le bienfait de ses méthodes?
Cela ne devrait pas être en théorie le cas ni pour moi, ni pour eux (la relation entre le niveau de l’athlète et ses qualités d’entraîneur) mais je sais le mécanisme conscient ou inconscient qui se met forcément en marche derrière. Je m’étais mis bcp de pression en Australie à ce niveau, pour Kona beaucoup moins d’autant que je n’ai pas forcément UNE méthode unique et ai expérimenté quelques variantes de préparation que je n’ai « appliquées » qu’à 3 athlètes.
Peux tu nous parler de ta course? Tout semble avoir fonctionné selon le plan, non?
Si l’on fait un résumé rapide, c’est ça, tout s’est passé comme prévu et espéré. Si l’on fouille un peu, c’est un peu moins positif hormis en natation, paradoxalement où j’ai laissé peu d’énergie et me suis fait presque plaisir lol. Le temps est un peu plus lent qu’escompté mais 2-3 petits imprévus et une petite houle l’expliquent. A vélo, les conditions étaient bonnes et c’était une année rapide et j’aurai dû plus en profiter mais j’ai été un peu trop conservateur (cf. ci-dessous sur le manque de volume qui peut impacter la confiance) et certains évènements (non récupération de mon 2è bidon aéro à Hawi) + choix stratégique (première heure en surrégime pour être libéré de l’éventuelle densité) m’ont empêché de prendre plus de risques. A pied, je suis vraiment déçu, dès les premières foulées, je me suis laissé polluer l’esprit par une cheville bloquée et ensuite par un ongle qui se décollait. Je n’ai pas été bon et n’ai pas réussi à voir au-delà de ça. La chaleur dans l’Energie Lab et un petit oubli impardonnable en alimentation auraient pu m’être plus préjudiciables donc je m’en tire quand même pas si mal même si j’ai des regrets c’est sur cette partie.
Il existe un léger contraste entre le ch’triman (Ironman dans le nord de la France) et Kona, non?
Oui le Ch’triman c’est l’anti-Kona à bien des égards (sauf l’exigence du parcours vélo qui est proche) et j’apprécie beaucoup les 2 et le fait que les 2 puissent exister.
Maintenant que ton temps est plus limité, est-ce que cela a changé tes méthodes d’entrainement? Est-ce que tu utilises une démarche plus scientifique comme le TSS? Pour les athlètes mono-disciplines notamment en prépa vélo, j’utilise le TSS, CTL et ATL pour le TSB mais pour beaucoup de triathlètes, les contraintes extra-sportives sont une part énorme de la fatigue globale générée donc là je suis le plus attentif c’est surtout sur le HRv (L’analyse de l’intervariabilité cardiaque.). Une séance à 300 de TSS avec 10h de sommeil en semaine de stage ce n’est pas un impact forcément plus fort qu’une séance de 150 de TSS calée après 5 heures de sommeil, une journée stressante de boulot et une alimentation pas optimale.
As-tu des conseils à donner, selon toi ce qu’on devrait faire plus? Et ce qu’on devrait arrêter de faire?
Des conseils généraux c’est toujours très délicats d’autant que je ne sais pas quelles sont les habitudes au Canada. En France, vraiment de manière générale pour l’Ironman, j’ai l’impression que l’on s’entraîne trop vite en course à pied et que l’on ne dort pas assez.
Il semble y avoir une nouvelle mode en ce moment, le 2e amateur à Kona dit avoir fait que 12h en moyenne et qu’il ne fait pas de nouvelle session tant qu’il n’a pas entièrement récupéré la précédente. Que penses-tu de cela?
J’ai lu également cela. Pour le 12h, je ne suis pas du tout surpris (j’ai fait 13h). Pour le principe de la récupération complète avant une nouvelle séance, je suis plus sceptique et c’est contraire à tout ce que j’ai toujours lu et expérimenté une fois revenu à un certain niveau. Difficile d’en tirer des conclusions, peut-être serait-il plus fort en acceptant une charge plus forte sur une petite période de temps? Mais effectivement, développer la résistance à la fatigue en étant jamais fatigué, c’est un concept sympa et (marketing-ment au moins ;-)) intéressant! Sans ironie, ça m’intéresse et j’essaie d’avoir le moins d’à priori possible ou en tout cas, de les mettre à l’épreuve.
C’est un peu étonnant quand Ironman nous dit que l’athlète moyen fait plus de 20h par semaine.
C’est à cause d’Hellriegel, il faussait la moyenne générale! Plus sérieusement, tout dépend où la période prise en compte par les chiffres (annuel, prépa finale), comment on les calcule (échauff, étirements, inclus ou non) et ce qu’on calcule (musculation, vélotaf) et la qualité des chiffres (le temps passé sur un HT ou un outdoor n’est pas exactement le même).
D’ailleurs, tu fais ton meilleur temps à Kona avec le moins d’entrainement, qu’elles sont tes conclusions la dessus?
Qu’il n’y en a aucune à en tirer justement. J’aurai peut-être été bcp plus fort si je m’étais entraîné 25h/semaine. Beaucoup plus fort… ou blessé… ou divorcé… ou au chômage donc je n’en tire aucune conclusion particulière et surtout pas « s’entraîner moins pour gagner plus ». Sans doute que le temps limité oblige à rationaliser et être plus efficace dans les séances et que dans les gros volumes, il y a peut-être parfois de l’inutile voire du contre-productif mais qui dans le top20 s’entraîne moins de 20h/semaine entre Semaine -10 et Semaine -2? Très peu je pense.
Experience? Accumulation?
Absolument, c’est aussi une donnée à prendre en compte quand des athlètes d’endurance annoncent un volume faible. Mes 18h/semaines sur les 3 derniers mois et les 13h annuels « cachent » quelques très grosses séances voire quelques blocs plus « costauds » comme 290km à pied sur 28j ou 1600km à vélo sur 27j. Rien de monstrueux mais peut-être plus explicite de certaines charges qu’une simple moyenne annuelle. Et même dans ces volumes, le contenu reste le plus important.
« le temps passé sur un HT ou un outdoor n’est pas exactement le même »
J’imagine que HT c’est pour Home Trainer, donc j’aimerais demander quel pourrait-être le ratio temps, HT versus outdoor?
De mémoire 45 minutes de HT = 1h de route.
ça dépend des auteurs, des fois on voit un fois deux extrèmmmmmmmmement optimistes, Grappe parle de * 1,5, ensuite.. ça dépend quand même vachement des conditions…
En ville, c’est dur de ne pas être en sous intensité, en campagne, personnellement, ça m’arrive de ne pas défaire les chaussures des pédales.
Je crois que le chiffre de Grappe ne considère pas les arrets mais la différence de perception à l’effort ( > mental).