Alizée Brien se fait trimer!

Figure bien connue du milieu du triathlon Québécois, cet électron libre qu’est Alizée Brien navigue à l’hauteur de son talent, cela l’a emmené récemment aux championnats du monde UCI junior cette année. Depuis, il existe une certaine confusion générale face à ce parcours atypique. Une triathlète en vélo, une cycliste en triathlon? Evidemment, Trimes a voulu en savoir plus.

Alizée, tu viens de terminer ta première saison en cyclisme, avec ta sélection canadienne pour les championnats du monde, cela était-il au delà de tes attentes? Oui. J’ai débuté ma saison de cyclisme au printemps avec un plan d’entraînement et des objectifs axés sur le triathlon, je ne savais donc pas si j’allais réellement performer en vélo. À ma première course de vélo, je me suis beaucoup amusée et j’ai pris conscience du déroulement d’une course sur route en vélo ainsi que de l’esprit d’équipe qui règne dans ce milieu, ce qui m’a enthousiasmée pour le reste de la saison. Puis, j’ai commencé à avoir de bons résultats. Je n’avais pas vraiment pensé aux championnats du monde avant les championnats canadiens qui ont eu lieu au début août. C’est là que j’ai réalisé que j’avais peut-être une chance de participer à cet évènement international. J’ai bien performé aux nationaux et je me suis taillée une place sur l’équipe canadienne pour ce projet. Je n’en revenais tout simplement pas. Ça a largement dépassé mes attentes pour ma première saison de vélo qui était sensée être une saison axée sur le triathlon, plus particulièrement sur les championnats panaméricains à Edmonton et les championnats canadiens à Kelowna.

Tu es passée d’un sport ultra individualiste à un sport où tout est stratégique. Aussi, c’est un sport ou ce n’est pas toujours la plus forte qui gagne contrairement au triathlon. Comment as-tu vécu ce changement? J’ai adoré ce changement. C’est d’ailleurs cet aspect stratégique et l’esprit d’équipe qui m’ont fait apprécié le cyclisme dès ma première course. Même si ce n’est pas toujours la plus forte physiquement qui gagne une course sur route, elle a besoin de travailler fort et d’avoir une bonne équipe pour gagner, surtout si ça se fini au sprint. De plus, c’est très gratifiant de voir une de ses coéquipières gagner une course grâce aux fruits du travail fait par toute l’équipe. Parfois, l’important n’est pas toujours de gagner… Les courses sur route sont tellement excitantes étant donné la durée et toutes les différentes possibilités de déroulement : attaques, échappées, sprints, montées que c’est simplement amusant et valorisant de participer à une telle compétition. Finalement, le TT est un effort individuel et très intense, alors disons que les plus fortes qui ne gagnent pas les courses sur route peuvent se reprendre dans cette épreuve!

Le milieu du vélo est réputé comme dur, tu as d’ailleurs chuté à chaque jour d’une course de 3 jours. Cela étai-il dû à un manque de technique ou une malchance? En ce sens, as-tu eu l’impression que le milieu t’a jugé? C’est vrai, cet été, au cours du Tour de la relève internationale de Rimouski, j’ai chuté 3 fois en peu de temps… Nous courions avec les cadets garçons ce qui représentait un très gros peloton (environ 140 coureurs) et c’était la première fois que je roulais dans un si gros groupe de cyclistes. J’ai été malchanceuse  pour deux de mes chutes en étant, entre autres, prise derrière une chute massive à l’avant du peloton mais,  j’ai aussi fait ma part d’erreurs. Après ma troisième chute, j’ai dû aller à l’hôpital pour une contusion au triceps, ce qui m’a empêché de terminer le tour. Toutefois, je me compte très chanceuse puisque je m’en suis tirée avec cette blessure et seulement quelques grosses égratignures. Le milieu ne m’a pas jugé. Mes coéquipières, les entraîneurs et les gens du milieu m’ont plutôt appuyée, consolée et ils m’ont donné des conseils. Ils ont très bien compris que c’était l’expérience qui rentrait comme c’était ma première année de compétition en vélo de route. D’ailleurs, je crois que tout le monde passe par cette période d’apprentissage en vélo et que tous les cyclistes doivent avoir quelques mésaventures pour être capable de s’améliorer et de passer à un autre niveau.

La majorité d’entre nous sommes des triathlètes, peux-tu nous dire à quoi ressemble ta semaine typique d’entraînement en tant que cycliste? En fait, j’ai moi même de la difficulté à le dire, puisque, jusqu’à tout récemment, je m’entraînais encore à la natation et à la course à pied. J’ai eu un avant-goût de la vraie vie de cycliste au camp préparatoire aux championnats du monde auquel j’ai participé avec l’équipe canadienne au début septembre en Belgique et tout ce que je peux dire, c’est qu’on roule, on roule et on roule! J’imagine donc qu’une semaine typique constitue en 6 jours d’entraînements de vélo avec une journée de congé. Parfois deux entraînements par journée, des intensités, des longues sorties,  programme « de core » et de musculation…

Tu sembles d’ailleurs très bien faire en TT, est-ce que tu penses que cela vient de la specificité des entrainements vélo de triathlon? Oui, c’est sur que mon expérience de vélo en triathlon m’a aidé, même si dans un triathlon je me retrouve rarement seule à la portion vélo. Je pense aussi qu’étant donné que le TT est un effort individuel et peu technique, ma forme générale venue du triathlon m’a aidé à performer dans cette discipline intense et souffrante.

Tu as dû mettre fin à ta saison de triathlon après les championnats panaméricains où tu as pris le 12e rang pour te préparer spécifiquement à des courses cyclistes importantes. Comment s’est passée cette préparation? A-t-il été difficile d’arrêter de nager et de courir? J’ai arrêté de nager et de courir progressivement et fait de plus en plus de vélo. C’est certain que ça me paraissait bizarre de faire autant de vélo, de ne plus faire des entraînements d’intensité à la course à pied ou à la natation et de ne plus toujours m’entraîner avec les gens avec lesquels j’étais habituée de m’entraîner, mais j’adore le vélo et en faire plus m’a simplement motivée pour les prochaines compétitions. Aussi, j’ai été très bien entourée et encouragée lors de cette transition par mes amis, ma famille et ma coach en plus d’avoir la chance d’être dans une équipe de vélo vraiment entraînante et intéressante.

Comment s’est déroulée ta course au championnat du monde UCI? Tout d’abord, l’évènement était tout simplement extraordinaire! Tout était gros, magnifique et bien organisé. Il y avait des milliers de spectateurs, des photographes, des journalistes, des dizaines de pays (incluant plusieurs athlètes connus mondialement), c’était vraiment impressionnant. Je suis même montée dans l’ascenseur de l’hôtel avec Mark Cavendish! De plus, l’équipe canadienne possédait un excellent personnel qui était à notre disposition tout au long du voyage : mécano, entraîneur, massothérapeute ce qui était vraiment incroyable. Pour ce qui est de la course sur route, elle consistait en 5 tours de 14km sur un parcours peu vallonné incluant 2 courtes côtes. Il y avait 74 filles sur la ligne de départ et nous étions 4 de l’équipe canadienne. Je dirais que j’ai eu une bonne course, mais que j’ai été victime de petites malchances. J’ai été prise derrière une chute et, après m’être écrasée sur une australienne, je suis repartie. Évidemment, rattraper le peloton par la suite a été très difficile et j’y ai laissé beaucoup d’énergie. Puis après, alors que j’étais à l’arrière du peloton,  une attaque a eu lieu dans une des deux côtes et je me suis fait lâchée. J’ai quand même terminé à l’arrière dans un petit groupe de 6 filles au 61ème rang. Le résultat, cependant, m’importe peu. Je suis simplement heureuse d’avoir donné tout ce que j’avais dans cette course et d’avoir vécu cette expérience hors du commun.

La question qui tue. Cyclisme vs triathlon? As-tu pris une décision ou devras-tu en prendre une dans le futur? Surtout qu’avec ton potentiel en vélo, les courses ITU avec « drafting » ne sont pas totalement à ton avantage, penses-tu faire une migration vers la longue distance un jour? Je n’ai pas pris une décision définitive pour l’avenir, mais pour l’année prochaine, je me concentrerai sur le vélo de route. J’aime encore courir et nager et j’ai toujours l’intention de compléter un IronMan au moins une fois dans ma vie donc il n’est pas impossible que je me redirige vers le longue distance plus tard dans ma carrière après avoir accompli tout ce que je voulais accomplir en cyclisme. Je n’y ai vraiment pas réfléchi plus que ça pour l’instant…

Suite à tes performances de 2011, est-ce que tu as été approché par des équipes professionnelles? ou par des commanditaires potentiels? Je n’ai pas été approchée directement, mais je suis présentement en discussion et à la recherche d’une équipe pour l’année prochaine. Dans le milieu du vélo, les commanditaires viennent souvent avec l’équipe dont tu fais parti. Je n’ai donc pas de nouveaux commanditaires mis à part ceux qui m’ont supporté cette saison et qui me supportent encore : Merrell, Samson Groupe Conseil, HED et Espresso Sports. Je les remercie d’ailleurs énormément pour l’aide et la générosité qu’ils m’apportent jour après jour.

Selon toi, penses-tu qu’une carrière en cyclisme est plus viable qu’une carrière en triathlon au niveau élite? Aussi, est-ce qu’une carrière passe forcement par l’Europe? Une carrière en vélo, pour le moment, je pense que oui. En effet, l’UCI est basée en Suisse, les plus grosses et importantes courses au monde sont en Europe et plusieurs des meilleures équipes viennent aussi de ce continent. Le calibre est beaucoup plus relevé là-bas qu’ici et les pelotons beaucoup plus gros ce qui permet de s’améliorer et de prendre de l’expérience. Pour atteindre un plus haut niveau et être compétitif sur le circuit mondial, je crois que rouler en Europe demeure un très grand avantage et un bon outil. Néanmoins, je ne crois pas qu’une carrière en cyclisme soit plus viable qu’une carrière en triathlon au niveau élite, puisque des athlètes de tous âges performent présentement dans les deux sports comme Simon Whitfield ou George Hincapie.

Penses-tu participer à des triathlons l’été prochain? Je n’en suis pas encore certaine, mais, honnêtement, je ne pense pas. L’année prochaine sera ma première année senior en vélo de route et je veux me concentrer et m’entraîner à fond pour bien m’adapter à ce changement. Je vais assurément venir voir et encourager mes amis triathlètes à quelques uns des triathlons au Québec ou en Ontario.

Quelque chose que tu aimerais ajouter? Simplement un gros merci à mes commanditaires : Merrell, Samson Groupe Conseil, HED, Espresso Sports, mon équipe de vélo Spidertech propulsée par PowerWatts, ma coach Kyla Rollinson, mes partenaires d’entraînements, ma famille, mes amis qui me supportent énormément et tous ceux que j’oublierais de mentionner.


3 commentaires
  1. Belle entrevue Ali! Je suis certaine que tu accompliras de belles choses dès l’an prochain en bike. L’équipe qui te mettra la main dessus sera chanceuse et les adversaires s’en mordront les doigts!

    Eve 🙂

    PS : Est-ce qu’on s’échappe à Charlevoix? 😉