La semaine dernière se tenait le Triathlon Business International, ce rendez-vous annuel regroupe les différents acteurs majeurs du triathlon. Même si cet événement tenu en Californie tombe dans l’americanocentrisme, les sujets abordés rejoignent les futures tendances. Le milieu du triathlon nous a rarement habitués à tomber dans l’autocritique, cette édition sera l’exception.
Cela était sur toutes les lèvres, le marché nord-américain du triathlon n’est plus en expansion. On savait que les nouvelles pratiques du sport d’endurance allaient finir par se faire sentir.
Pour la première fois, Andrew Messick (CEO d’Ironman) a exprimé la difficulté du groupe à attirer de nouveaux pratiquants. Ironman accepte d’ailleurs un constat d’échec avec leur série de courses en distance olympique (5150). On s’est rendu compte que notre marque n’a pas l’effet escompté sur les amateurs sur les courses de distance en dessous du 70.3, dit-il. Ironman a donc décidé de s’allier avec Lifetime. Cette chaine de centre de mise en forme est derrière un circuit très actif dans la distance olympique. Ces deux compagnies ont donc décidé de collaborer et il existe déjà une rumeur confirmant que la WTC se fera racheter par eux (Slowtwich est le premier à évoquer cette croyance médiatiquement). Dans cette opération, Ironman s’offre une visibilité face à toutes les personnes qui ont d’avoir un mode de vie actif en allant s’entrainer dans un centre de condition physique.
Ce mariage forcé permettra d’étendre le nombre de courses. Évidemment, avec toutes les acquisitions d’Ironman, il est difficile de croire que le triathlon est tombé dans une sorte de récession. Dans cette logique, s’il n’y a plus de nouveaux pratiquants, Ironman continuera de grandir en s’accordant une plus grande part de marché. L’union de Lifetime et Ironman peut être interprétée que toutes les courses importantes sont sous leur contrôle.
Ce sont donc les courses indépendantes qui en payent le prix. Le sport est rentré dans une mentalité très capitaliste ou il faut toujours augmenter les gains à chaque exercice financier. Les courses sont de plus en plus chères et cela aurait finalement un effet.
Chez Trimes, on parle souvent de ce danger d’être un sport réservé à une certaine classe sociale. Pour le moment, il y a une prise de conscience face à la faible participation des femmes. La natation en lac et le prix des vélos de triathlons sont des barrières importantes pour elle.
Historiquement, le triathlon a toujours attiré les hommes avec un revenu important, l’USAT confirme que 70% des participants sont des males et que le salaire moyen est de 105 000$.
Avec ces données, le doute n’est plus permis, l’industrie a clairement ignoré les jeunes et les considérations des femmes. On se rappellera l’abandon par Ironman de ses triathlons Ironkids (devenu des courses à pied participatives).
Il existe toujours ce stéréotype du triathlète narcissique, mais je crois que cela va vraiment changer, j’ai vraiment peur que le triathlon devienne un sport associé aux années 2000, il se doit de réagir face aux autres nouveaux sports, dit Rob Ubach de l’USAT. La fédération américaine a avoué que le nombre de licenciés n’était plus en augmentation.
Pour Scott Brown, présidents de l’Universal Sport Network (diffuseur américain spécialisé dans le sport d’endurance et qui a popularisé le cyclisme aux États-Unis), nous n’avons plus à attendre, les possibilités pour diffuser le sport d’endurance a vraiment changé avec la possibilité d’utiliser des drones et d’utiliser des caméras sur les athlètes, dit-il.
Ironiquement, la solution la plus évoquée pour vendre le sport à de nouveaux adeptes est d’être plus diffusé. Même si certains (nous) aimeraient que la couverture s’attarde plus sur les élites, Rub Urbach ne se fait plus d’illusions. Notre sport est commandé par les participatifs. Nous pouvons rendre le sport plus attirant pour la télévision afin d’obtenir une meilleure distribution. Il y a tellement une opportunité à prendre avec les nouvelles technologies selon le CEO de l’USAT.
Même si ce constat est alarmiste, c’est encourageant de voir les grandes institutions publiquement s’attarder sur un problème déjà très apparent. Avec des courses de plus en plus chères et le rachat des meilleures courses indépendantes, le sport triple doit revenir à la base.
Et l’Europe? Contrairement à l’Amérique du Nord, les fédérations nationales ne sont pas rentrées dans ce mécanisme où il fallait concentrer ses énergies sur une catégorie sociale.
Même si elle est pour le moment mieux outillée, le marché du sport d’endurance est devenu ultra concurrentiel. Puisque les amateurs se rendent compte qu’ils peuvent avoir la même expérience dans un autre sport avec une dépense plus restreinte (budgétaire et de temps), seules la variété et la mentalité du dépassement jouent en faveur du triathlon.
Le prix d’un vélo, d’une combi de natation, de vêtement de vélo, de vêtements de course à pied, le prix d’entrée dans les piscines…sans oublier le tarif d’inscription aux épreuves qui est peut être le plus décourageant…L’addition est lourde !
Intéressant comme article, cependant qu’en est-il du marché québécois ou canadien ? Subit-il les mêmes effets de « décroissances » ou de « stagnation » ? Sachant que le sport a connu une augmentation d’inscription à Triathlon Québec.
Merci
La situation est différente puisqu’il y a un réel effort pour attirer les jeunes avec le triathlon scolaire. Pour ce qui est de la longue distance, je pense que c’est probablement différent. Même s’il y a un effet tremblant, la moitié des participants en sont à leur première participation. Donc cela signifie qu’ils sont nombreux à ne pas revenir… Tout cela est à suivre.
C’est article est très intéressant ainsi que vos commentaires très pertinents. Le sport est encore en progression au Québec, mais l’accessibilité est certainement un des enjeux importants qui sera abordé dans la prochaine réflexion stratégique de Triathlon Québec en 2015.
Benoit-Hugo