On se questionne souvent qu’elle est le cheminement des athlètes pour passer pro sur le circuit Ironman/70.3. Sur la scène internationale, même si le Québec à une longue tradition de champions en AG (hommes), on ne pouvait plus en dire autant chez les pros. Cedric Boily vient pourtant de franchir le pas en montant pour la première fois sur le podium à Ironman Puerto Rico 70.3. C’est d’autant plus remarquable puisque c’était sa première course dans la catégorie pro. On s’est entretenu avec lui.
Si je me rappelle bien, il y a 4 ans, tu me posais des questions sur le triathlon, pourtant avec ton passé de nageur et de cycliste, cela paraissait comme évident… Peux-tu nous décrire comment tu as finalement fait tes premiers pas…
Fallait bien que je me réfère à un expert..
En fait, mon passé comme nageur était assez lointain. Il y a 4 ans je travaillais chez Cycles Gervais Rioux à Montréal et je faisais beaucoup de vélo sans trop de direction ni d’objectifs précis. Ça faisait quelques années que je pensais un peu au triathlon car mon épouse en faisait et j’avais la chance d’aller l’encourager à quelques évènements à chaque année, lesquels me semblait fort plus agréables que mes courses de vélo. C’est en la voyant faire le demi-esprit en 2011 que j’ai décidé de m’essayer au triathlon.
J’imagine que dans tes débuts, tu as du trouvé le milieu très différent que le cyclisme… d’autant plus que tu travaillais dans un magasin de vélo à l’époque…
Effectivement. Je n’en revenais pas. Au lieu d’avoir des ‘clics’ entre co-équipiers et du monde qui ne te regarde même pas à moins que tu aies gagné une course, au triathlon, on donne des ‘high-five’ et on encourage la compétition. C’est très participatif et c’est ce qui m’a attiré au sport. À la boutique de vélo, j’ai eu droit à quelques regards croches , mais c’était des plaisanteries. Le personnel du CGR a toujours été très encourageant. Les gars ont joué un grand rôle dans mon développement athlétique.
C’est allé très vite pour toi, en 2014, tu deviens vice-champion du monde en 30-34 et tu as commencé à coacher… As-tu l’impression que l’arrivée de Mont-Tremblant sur le circuit t’a aidé? Je veux dire que la tenue des championnats du monde ici a surement joué dans ta motivation
Ça s’est passé vite, mais ça faisait quand même 3 saisons complètes que j’y travaillais. Sans trop en parler aux autres, un podium aux championnats du monde était mon objectif depuis quelque temps. Je l’aurais pris à Vegas l’année dernière, mais j’avoue qu’à Tremblant c’était un peu plus réaliste. C’est un endroit et un climat qui m’est un peu plus familier et j’avais déjà eu un certain succès sur le parcours à mon premier 70.3 en 2012.
Si je ne me trompe pas, tu es passé pro à ta 4e saison. Qu’est-ce qui te motivait à prendre ta carte? Tu aurais très bien pu rester AG…
Très difficile à expliquer… J’avais un plan de 3 ans : si après trois ans je sentais que j’étais prêt à faire le saut vers les rangs professionnels, je le ferais. Disons que je suis en train d’exécuter le plan. C’est pour vivre le «trip» vraiment.
Ton support est encore limité, as-tu l’impression que le triathlon est désormais ton métier?
Hahaha! Ça fait 3 ans que je fais semblant que c’est mon métier! J’aimerais répondre que oui, mais est-ce que ça sous-entendrait que j’en ai fait mon gagne-pain? Je suis dans une période de ma vie ou j’ai la chance de me concentrer sur le triathlon et j’en prends avantage, mais j’aime mieux pas y penser en terme de métier.. Ça me mettrait peut-être un peu trop de pression pour gagner des sous. Le coaching, c’est ce que j’adore et j’espère que mon expérience en triathlon m’ouvrira quelques portes.
Toi qui as été compétitif en natation et en vélo, est-ce que tu vois le triathlon comme une nouvelle chance?
Je n’y ai jamais vraiment pensé, mais peut-être que c’est ça. Le triathlon s’apprête très bien aux gens ‘plus vieux’. On devient de plus en plus fort en sport d’endurance en vieillissant. Maintenant que j’y pense, c’est certain que rendu dans la 30aine, je me considère chanceux d’avoir la chance de vivre cette expérience.
Dans ce projet, as-tu l’impression d’être soutenu à l’hauteur de tes ambitions?
Absolument! Par mon épouse, ma famille et mes amis. Leur support est inconditionnel à mes résultats et je l’apprécie énormément. La communauté néo-brunswickoise m’a également reçu à bras ouvert quand on a vécu à Moncton il y a quelques années. Je continue d’y retourner pour donner des cliniques de temps en temps. C’est une petite communauté de triathlètes qui est très unie.
Tu viens de terminer 3e à Puerto Rico, es-tu étonné par ce résultat?
Après des mois de rouleau et de course à pied dans le froid et la neige, je n’avais vraiment aucune idée à quoi m’attendre. Puerto Rico, c’était plus pour l’expérience que n’importe quoi – ça aurait été une course mémorable, peu importe le résultat. Cela étant dit, quand je visualise les courses, je me vois plutôt franchir la ligne d’arrivée parmi les premiers. Disons que je suis plus étonné par la façon dont la course s’est déroulée.
Peux-tu nous parler de cette course?
De façon générale, ça a été une super belle course. Le parcours, l’organisation, les spectateurs. Tout était à point. Il y a eu quelques petits pépins avec une nouvelle sorte de puce donc on n’a pas les splits et résultats exacts, mais c’est un petit détail qui, à la fin, n’avait aucune incidence sur les résultats. Personnellement, je suis très content de mon résultat final même si je ne me sentais pas particulièrement bien à la nage ni au vélo. En débarquant du vélo, j’avais vraiment l’impression qu’il ne me restait plus grand-chose dans le réservoir et à ce point-là j’espérais qu’un top 10 soit possible. J’ai cependant réussi à rattraper quelques gars qui m’avaient devancé pendant la transition et même à les dépasser dans les premières côtes du parcours. J’ai occupé le 4e rang pendant la plupart de la course à pied et à environ 5km de la fin j’ai remarqué que je commençais à me rapprocher de la 3e position. Je l’ai prise à environ 2km de la fin et j’ai tenu le coup jusqu’à la fin! J’ai toujours été un peu plus faible à la course à pied, donc que la course se soit déroulée ainsi, c’est ça qui a été le plus étonnant pour moi.
Comment te décris-tu comme athlète?
Bonne question que j’ai du mal à répondre. Je dirais que je suis un athlète discipliné. Dans ma routine, ma préparation, mes entrainements. Je ne crois pas vraiment avoir une ‘force’ comme triathlète dans aucun des trois sports, mais je pense que la progression de mes performances est pas mal constante et je le dois à mon approche à l’entrainement et à la compétition.
Quels sont tes objectifs désormais? Est-ce que la qualification pour les championnats du monde de 70.3 est ton objectif principal?
Ça serait très très difficile de se qualifier pour les championnats du monde de 70.3 cette année. Mon objectif est plutôt d’apprendre à gérer les courses dans la catégorie pro et de m’améliorer dans les trois sports. J’imagine que tout cela pourrait changer en fonction des résultats de mes prochaines courses, mais pour l’instant les mondiaux ne sont pas vraiment au menu pour 2015.
Maintenant que tes résultats ne passent plus inaperçus… Est-ce que l’on peut dire que tu es québécois ? Est-ce que la scène d’ici t’a aidé?
Bien sûr que oui! Ça fait quelques années que nous avons quitté le Québec, mais je suis quand même né dans la belle province et toute ma famille y habite encore. C’est là que j’ai été initié au sport avec le club de triathlon Les Taureaux à Gatineau et c’est au Québec que j’ai assisté et participé à mes premières courses. La scène de triathlon québécoise m’a donc beaucoup aidé.
Est-ce que tu penses passer à l’ironman prochainement?
Non. Un ironman complet, c’est quand même un peu malade. Sans blague, je ne dis pas non, mais je trouve qu’il me reste encore beaucoup de chemin à faire dans la demie-distance. Peut-être dans quelques années.
Est-ce que tu voudrais ajouter quelque chose?
Merci de prendre le temps de me parler!
A+, Ced. Alfie serait fier!