En rentrant chez moi il y a quelques mois, je suis tombé sur une entrevue radiophonique de Laurent Garnier. C’est un DJ qui est apparu dans les années 90 et qui perdure. Dans ses propos, il s’alarmait face à l’avenir de la musique puisque plus personne n’est capable de vivre de ses compositions, affirmant que seuls les concerts permettaient aux artistes de survivre monétairement. Dans une génération qui réclame le tout gratuit, on ne veut plus investir dans un artiste en se procurant une copie physique.
Pourquoi parler de cela? Lors de la grande finale ITU, j’étais submergé par toutes ces histoires qui étaient en train de s’écrire. Avec ma proximité avec plusieurs athlètes, je connais leurs sacrifices et leurs joies ou déceptions. Pourtant dans notre société où seul le gagnant est vu comme un champion, on est devenu totalement insensible face à eux en jugeant négativement tous ceux qui ne sont pas victorieux. Un manque d’éducation et d’intérêt face à ce milieu?
Il y a la partie apparente, la course et le reste, ces athlètes qui mettent tout sur la table. Ses cadres techniques et les coachs qui sont sans cesse à la recherche perpétuelle de nouvelles connaissances. En fait, le triathlon élite est incroyablement fascinant lorsqu’on en connait les subtilités puisqu’il est sans cesse en réinvention.
Alors pourquoi ce désintérêt? En discutant avec l’un des champions olympiques de ce sport, on se questionnait pourquoi l’ITU et la longue distance n’étaient pas plus populaire puisque le spectacle est au rendez-vous. Il lançait comme hypothèse que les athlètes manquaient tout simplement de charisme. Dans la réalité, ce ne sont pas les élites qui sont fades, mais les médias qui refusent de s’intéresser à eux.
Pour exemple, la relation entre les deux frères Brownlee est si complexe et à l’image d’une relation entre deux frangins dans un rapport dominant dominé, une histoire vieille comme le monde qui fascine toujours. Tout cela serait si populaire dans un autre sport, mais le message est principalement véhiculé par une institution (ITU) et donc de nombreux sujets ne sont pas abordés. On reste dans le descriptif et non l’analyse des différents phénomènes dans notre sport. Dans une discipline où les pratiquants connaissent très mal les élites, rares sont ceux qui ont voulu remédier à cette situation.
Les médias écrivent uniquement sur des sujets qui sont garantis comme ultra vendeurs et populaires? Est-ce qu’il y a vraiment une volonté d’élever le discours et de produire du contenu pour un lectorat restreint. On ne critique pas les autres, on espère simplement qu’il y a de la place pour autre chose. L’affection de Trimes chez les élites et apprentis-élites nous prouvent le contraire.
Tout comme la musique, il y a actuellement une culture du tout gratuit dans les médias sportifs. Écrire pour plaire aux annonceurs et être le plus grand public possible. Écrire pour être les premiers dans les moteurs de recherche ou générer plus de revenus avec des annonceurs affiliés. Il y a toujours une idée en arrière. Émettre publiquement des doutes sur les chaussettes de compression ou sur un organisateur et votre boite de courriels sera pleine de plaintes de ces fabricants qui sont pourtant à court d’arguments.
Dans cette culture de la gratuité, les lecteurs sont moins sélectifs puisqu’ils n’ont pas payé pour leurs lectures et dans cette société ou tout s’accélère, alors qui souhaite encore s’intéresser à un sujet en profondeur?
Un musicien a toujours le choix de composer en fonction de la demande, et espérera un succès populaire. Nous on veut faire notre truc à notre façon. On croit qu’avec en apportant un nouvel angle, on pourra avoir des sympathisants.
On écoute une chanson sans vraiment en savoir plus sur son créateur, son contexte, sa signification. En plus de 25 ans de triathlon, le sport a une culture très pauvre en comparaison avec d’autres sports comme le cyclisme ou l’athlétisme.
Notre publication web trimes.org à plusieurs années et elle s’est forgé un succès critique chez les compétitifs. On a toujours eu l’impression de remplir un trou. Aller au-delà de la partie visible du sport. Malheureusement, il y a un équilibre difficile à trouver pour garder une indépendance. Oui, on carbure avant tout de notre passion.
À l’image d’un artiste, on veut écrire sans concession. Maintenant, cela fait plusieurs mois qu’on souhaitait trouver une formule pour continuer à développer Trimes.
Contrairement à ce que certains pensent, Trimes reste une publication gratuite et l’accessibilité de son contenu est une priorité pour nous. On a donc pensé à la formule d’un financement participatif par abonnement puisque cela nous permet de ne pas être totalement dépendants de la publicité.
L’idée est simple, si vous croyez en nous et que vous le pouvez, aidez-nous financièrement. Eh oui, on pense déjà à des initiatives pour remercier nos abonnés. Avant de te demander si 20 euros, c’est cher, combien de temps passes-tu à lire Trimes?
La réalité est simple, si seulement un tiers de nos lecteurs réguliers investissent en nous, cela nous permettrait d’avoir un budget pour nous rendre à plusieurs événements importants. Par exemple, on veut stopper le fait qu’il n’y a pas une présence régulière francophone sur la série mondiale. On souhaite aussi continuer à améliorer la qualité de la publication.
Dans cette aventure, nous sommes excités et redevables. À l’image d’un athlète qui décide de tout donner et de franchir le pas en passant pro, nous voilà. Nous sommes peut-être naïfs de croire que Trimes à un potentiel, mais comme nos élites, on ne veut pas avoir de regrets.
Laurent Garnier disait justement que la musique techno devait être la musique du futur en constante évolution, Trimes aussi.
Bel article et j’aime beaucoup la comparaison avec Laurent Garnier car c’est un DJ que j’affectionne tout particulièrement 😉 Longue vie au triathlon et longue vie à TRIMES 😉
Personnellement je ne demande que ca d’avoir un media specialise dans le triathlon en langue francophone. Je suis un lecteur assidu de Slowtwich et aimerais que Trimes puisse etre plus a la hauteur. J’ai donc pas hesite une seule seconde a collaborer. Pourquoi pas proposer une formule comme les journaux quotidiens sur le Net? Des articles ouverts a tous et d’autres reserves aux abonnes?
Qu’il est parfois dur de vivre de sa passion!
P.S: suis d’accord avec Tyfoune, Laurent Garnier est un grand et bel artiste avec une musique exceptionnelle.
Oui, l’idée de bloquer l’accès a certains articles est dans notre esprit. C’est un long débat… Ce qu’on risque de faire, c’est bloquer l’accès après un nombre X d’articles par semaine… Enfin dans l’idéal, on voudrait offrir des privilèges aux membres.
L’explication était nécessaire je pense pour que cette notion de gratuité et d’abonnement soit comprise par le plus grand nombre.
En espérant que tous les lecteurs habituels qui apprécient et le peuvent fassent un geste, si modeste soit-il…
Bon vent !