La révélation de ce début de saison en série mondiale est fort probablement Vincent Luis. Le potentiel de cet ancien champion du monde junior de 2008 n’a jamais été mis en doute. 2015 marque pourtant un point marquant dans sa carrière. L’année de la maturité? Auteur de 3 podiums consécutifs en série mondiale, cette nouvelle performance à Londres (3e), confirme son entrée dans le cercle des athlètes attendus pour la victoire à toutes les courses. Trimes s’est entretenu avec Vincent pour en savoir plus sa performance. Comme à l’habitude, on remercie sa générosité pour le partage de ses expériences en course.
Ta première réaction lors de ton interview avec l’ITU est de dire que l’équipe de France se doit de gagner. As-tu l’impression qu’on est sous-estimé puisque certains parlent d’une confrontation, Yorkshire VS Espagne.
Vincent Luis : J’ai surtout dit cela, car quand on commence à monter régulièrement sur le podium, on espère gagner. Cela fait 6 ans que la série existe maintenant et aucun français n’a gagné d’étape. Je ne me soucie pas trop de savoir si la concurrence est anglaise, espagnole ou autre. C’est une course, ce qui compte c’est de gagner, peu importa la nation des autres.
Les spécialistes pensaient qu’on allait voir un groupe massif en T2… Scénario qui s’est imposé cette saison. Pourtant, dès la natation, il y avait une réelle volonté à faire la sélection
V. L : J’ai trouvé que la course fut intense du début à la fin, cela vient probablement de mes mauvaises sensations, mais après avoir demandé à droite et à gauche, beaucoup m’ont avoué avoir souffert.
Maintenant sur les parties natation et vélo je ne fais pas plus que ce que je dois faire, je ne veux pas m’enterrer dans un scénario de course. Avec ou sans échappée, je sais que je peux faire mal.
Est-ce que tu t’es rendu compte de l’absence de Johny? Pensais-tu que cela pouvait avoir une influence sur l’entente dans le groupe de tête?
V. L : J’ai tout de suite vu Johnny se mettre sur le côté après T1. Je n’ai pas trop vu ce qu’il lui arrivait donc c’est dur d’estimer s’il va rentrer dans le groupe ou non. Quand je l’ai vu après le 1er demi-tour, je savais que sa course était finie.
Encore une fois, tu réussis à sortir dans la tête en T2, les détails font la différence. Il y a de quoi être satisfait parce que tu réussis à sortir sans faire de petites erreurs…
V. L : J’ai toujours pensé qu’il vaut mieux avoir une seconde d’avance à la sortie de T2 qu’une de retard. Après il faut avouer que c’est assez risqué de se placer dans le final pour poser le vélo en tête. On a échangé quelques coups de casque et d’épaule avec Alistair, la guerre psychologique… On en a rigolé après la course.
En course à pied, Alistair ne semble pas être en mesure de faire la différence au début… avec son traditionnel départ en surrégime…
V. L : Je pense que maintenant plusieurs athlètes sont capables de partir entre 2’40 et 2’45 au 1er kilomètre. Après, c’est à celui qui va le moins ralentir. Quand le tempo baisse au bout de 1200m environ je me suis dit que j’allais temporiser 500m avant d’essayer d’en placer une. Mais quand un adversaire n’est pas au mieux, cela se sent. Alistair a dû voir que j’étais crispé durant toute la ligne droite qu’il a faite derrière moi. Il ne m’a laissé aucun répit en contrant directement.
As tu l’impression que l’allure augmente sur la fin, tu ne semblais pas te sentir très bien…
V. L : Honnêtement, je voyais bien que l’on ne courrait pas bien vite, une fois qu’Alistair est parti on a essayé avec Alarza pendant 600/800 maitres de limiter la casse, après, cela devient plutôt tactique afin d’aller chercher une place sur le podium. Ce n’était pas la grande forme, j’ai préféré assurer.
Es-tu déçu de ne pas avoir été plus présent pour la victoire?
V. L : Sitôt la ligne franchie j’avais un sentiment d’échec, je me sens capable de gagner. Maintenant, il faut être dans un bon jour. Hier, Alistair a été le meilleur et sa victoire est indiscutable.
Les courses sont encore nombreuses, pour l’instant je n’ai jamais manqué le podium, ne soyons pas trop pressé! À chaque jour suffit sa peine.
Le sentiment de confiance doit vraiment s’installer…
V. L : Oui, je m’installe dans une bonne dynamique, mais le sport reste une science inexacte et encore plus le triathlon. Tu peux avoir la capacité physique de gagner la course et tu retrouves ton vélo crevé dans le parc… Ça, c’est le sport, chacun à des cartes en main, il faut les poser au bon moment.
Le classement mondial désormais un enjeu?
V. L : J’ai envie de dire non tant que je ne suis pas qualifié pour Rio 2016. Si j’arrive à avoir ma qualif au test event, alors pourquoi ne pas jouer le classement mondial. Mais cela dépendra uniquement de mon état après Rio 2015. J’ai appris à ne plus vouloir courir deux lièvres à la fois.
Crédit photo : ITU / Benjamin Maze