Rodolphe occupe de plus en plus les manchettes. Champion américain collegial deux saisons d’affilé, il vient de gagner son premier 70.3 et d’effectuer son retour en coupe du monde. Pour celui que l’on peut fréquemment voir en France, les choses s’accélèrent. Récemment sélectionné pour représenter les États-Unis au championnat du monde ITU en U23, on s’est entretenu avec lui pour en savoir plus sur son changement de nationalité, son environment d’entrainement et son avenir.
Salut, Rodolphe, on est un peu perdu dans tes nationalités, peux-tu nous expliquer rapidement?
Je suis né aux US donc je suis Américain. À partir de Mi-aout, je vais courir pour les USA après 1 an de “ITU flag”. Je suis aussi Italien du côté de ma mère et Belge du côté de mon père. J’ai habité en France pendant une grande partie de ma vie, mais personne n’est Français dans ma famille.
Froidement, on aurait pourtant avoir l’impression que tu aurais plus de chances avec les Italiens… Est-ce que l’USAT est intervenu dans ton choix?
Non l’USAT n’est pas intervenu dans mon choix. La décision de changer de pays s’est prise parce que les Italiens ne me laissaient pas faire les Coupes du monde ou World Series. Ils voulaient garder le contrôle sur leur sélection, et ne laissaient personne d’autre aller aux courses (même en payant le voyage nous-mêmes!!). Aussi, leur système de sélection n’est pas clair du tout comme aux US, donc c’est très démotivant pour un athlète. Et finalement, d’un coté logistique, en habitant aux US au Colorado, c’est beaucoup plus pratique de courir pour les US et d’aller aux courses de sélection aux US ou proche des US.
Est-ce que tu remets en question la notion de représenter un pays?
Non, je pense que c’est important de représenter un pays, et de sentir une appartenance à ce pays. En faisant mes études aux US, et étant Américain depuis la naissance (même si j’ai habité en France), je commence à me sentir tout à fait Américain, et je ressens de la fierté de bientôt pouvoir représenter ce pays aux compétitions internationales.
À peine éligible, ton résultat à ITU Monterrey te permet d’être sélectionné pour les championnats du monde U23 à Chicago.
En effet, et ça fait très plaisir d’avoir des critères de sélection précis ici aux US. Je savais exactement ce que je devais faire pour me qualifier, et je l’ai fait, et c’est la 1ere fois que je vais aller à un Championnat du monde.
Comment te qualifierais-tu comme athlètes? Quelles sont tes forces et faiblesses?
J’ai toujours eu une faiblesse en natation. Mais ça fait 3 ans que j’y travaille énormément, et ça porte ces fruits. Cette saison, j’ai été 1er groupe dans toutes mes courses ITU. Je pense que je serais encore un peu limite au niveau WTS, mais j’y travaille certainement! Ma force a toujours été le vélo, mais en ITU ça ne sert que rarement. Et puis à pied, ça a aussi toujours été une force, même si en ITU j’ai encore du travail. Mais je suis convaincu que je suis capable de courir proche des meilleurs en ITU. En ce début d’année j’ai couru 2 fois dans les bas 32’ (Nationaux Universitaire et Monterrey ITU), donc avec un peu de travail je serais dans les 31’ ce qui me permettra de faire beaux résultats.
On sait que ton père était très fort en Ironman, est-ce qu’il intervient dans ta carrière? Est-ce qu’il apprécie tout de même l’ITU?
Mon père était et est très fort dans la longue distance (récemment champion du monde 70.3 2014 dans la catégorie 55-59) en effet, et il fait évidemment partie intégrante de mon développement en triathlon. Pas tellement niveau entrainement, mais beaucoup sur tout ce qui est autour (sponsors, logistiques, administratives). Il me supporte de façon extraordinaire, et je ne peux que le remercier. Il apprécie l’ITU, mais pour lui la passion est du côté d’Hawaii et l’Ironman. Et pour moi aussi un peu, car c’est là à Hawaii, quand j’avais 5-9 et 13ans que j’ai découvert le triathlon en suivant mon père pour la course.
Est-ce que je me trompe où tu étais à deux doigts de passer directement à la longue distance.
En effet, c’est toujours quelque chose auxquels, je pense. J’adore le vélo et l’ITU casse le vélo. Impossible de faire la différence à vélo comme on peut dans les no draft. Mon objectif long terme est définitivement dans le LD. Mais pour l’instant, afin de performer plus tard dans le long, et de peut-être tenter d’aller aux JO, je reste en ITU.
Tu es basé à Boulder, peux tu nous parler de ton environnement là-bas.
Je suis en 3e année à l’université du Colorado at Boulder et je suis dans l’équipe de triathlon de l’université. Je n’ai pas de coach depuis 2 ans et je m’entraîne en natation au club où Dave Scott et Simon Lessing entraînent et où de nombreux athlètes PROS du long s’entraînent aussi. Il y a un autre club où il y a le groupe de Siri Lindley (Paula Findlay, Valentina Carvalho, Ellie Salthouse, Mirinda Carfrae) et le Apex group (Cam Dye, Jason West…). J’ai un coach dédié uniquement à la course à pied, Brad Hudson qui est assez renommé dans le milieu. Ce qui est génial ici c’est le nombre d’athlètes de bon niveau avec qui on peut s’entraîner, on trouve toujours quelqu’un si besoin est. Toute l’atmosphère de la ville est healthy, fast & competitive.
Est-ce que cette ville reste pertinente aux athlètes en courte distance?
Je pense qu’il n’y a aucune contre-indication à s’entraîner ici en courte distance. D’accord on est en altitude, mais on peut tout à fait faire la vitesse nécessaire. C’est sûr que quand je reviens au niveau de la mer, on se sent un peu mieux, et on peut aller très vite un peu plus longtemps, ce qui a tout de même sûrement son importance au final. Mais bon, je pense que c’est une différence presque négligeable.
J’imagine que de pouvoir t’entrainer avec des athlètes non ITU a aussi ses avantages.
ITU ou pas, c’est génial de pouvoir côtoyer des champions du monde et autres athlètes PRO confirmés qui ont beaucoup d’expérience.
Tu as récemment gagné le challenge half de San Gil (Challenge). As-tu été étonné par ta performance? Ce résultat semble prouver que tu as déjà le volume nécessaire.
Oui, je pense que j’ai les qualités nécessaires pour pouvoir performer en LD. Un test d’effort en laboratoire me l’a d’ailleurs confirmé début mars, car pendant très longtemps, et jusqu’à des watts très importants, j’utilise un maximum de gras comme énergie et cela est très avantageux sur le long (test d’effort vélo). J’aime les efforts long et solitaire de CLM en vélo. Et puis à pied, j’ai beaucoup apprécié les 2 70.3 que j’ai fait depuis l’année dernière (1h13 notamment au Challenge Rancho Cordova).
Il parait que tu viens au Québec (ITU Pan AM Magog)?
Oui en effet, après avoir fait le Half Challenge San Gil fin Juin, et maintenant dans 1 semaine le no draft de NYC, je pense que c’est important de se replonger dans du ITU, avant d’aller à Tiszaujvaros pour la Coupe du monde.
Quelles sont tes ambitions à l’avenir?
Je voudrais d’abord rapidement intégrer le Top100 mondial ITU (124e à présent). Ensuite, je voudrais commencer à courir en WTS, et d’ici 2 ans, y performer (Top10). Si j’arrive à ce niveau, alors à ce moment-là j’irais à fond pour les Jeux de Tokyo. Par contre, à long terme, je voudrais passer sur le long, et mon rêve est de gagner Hawaii.