Jamais un athlète n’est arrivé en Ironman avec un curriculum aussi rempli en courte distance. Il n’aura fallu qu’une seule saison de transition pour le voir finalement redéfinir le sport. On se rappellera de son abandon au Championnat du monde de 70.3 de 2013 à Las Vegas, comme une étape marquante. Depuis cette course, seul un Javier Gomez l’a battu sur cette distance.
Les attentes étaient très grandes lors de sa première participation à Kona. Malheureusement, les dieux hawaïens ne seront pas de son côté, entre crevaison et pénalité pour drafting, posant le vélo vers la 10e place, l’allemand réussira tout de même une remontée en fin de course lui permettant de terminer à la troisième place.
Étonnamment, Jan Frodeno apporte un vent de fraicheur en longue distance, il a cette franchise qui peut paraitre presque insolente, mais qui démontre avant tout sa détermination. Lorsqu’on lui a demandé s’il ne s’ajoutait pas une certaine pression, il nous répondit, non, absolument pas! les gens me demandant et moi je dis simplement que je m’entraine pour gagner, c’est pour cela que je fais tout cela!
Lors de la saison 2014, plusieurs accidents de courses le priveront de sa première victoire en Ironman (Frankfort et Kona). Alors qu’il aurait pu se reposer sur ses lauriers en attendant une course sans malchance, Jan a continué à progresser, je crois que j’ai finalement trouvé une bonne façon pour rester constant et être à mon meilleur niveau. Cela me donne l’habilité d’être plus agressif ou d’avoir plusieurs options en fonction du déroulement de la course. C’est plaisant de pouvoir jouer la carte de la surprise, mais aussi d’avoir cette confiance pour mener la course dès le début.
Frodo réussira d’ailleurs cet exploit de mener la course de A à Z malgré des adversaires coriaces. Que cela soit Sebastian Kienle ou Frederik Van Lierde, ils ne seront jamais en mesure de revenir sur lui lors du championnat européen Ironman à Frankfurt. Même l’incroyable chaleur ne l’empêchera pas de finir en 7:53.
Contrairement aux croyances, l’Allemand a passé la majorité de son temps en Afrique du Sud et en Australie. La chaleur ne lui a jamais fait peur et les spécificités requises pour réussir à Kona ne semblent pas lui faire peur, au contraire.
Est-ce que l’on peut s’attendre à des temps records? Est-ce que le temps total de 8:03:56 par Craig Alexander pourrait tomber? Ainsi que le marathon de 2:40:04 de Mark Allen (parcours différent) est en péril?
Chose certaine, tous ses adversaires croient que les exigences pour gagner sont à la hausse. Lorsqu’on a questionné Jan après sa victoire au Championnat du monde de 70.3, il a été très clair, la victoire à Kona est mon seul objectif, je ne me suis jamais senti aussi fort de toute ma carrière.
Alors que tous les spécialistes sont unanimes et voient déjà Frodo porter la couronne, même s’il n’a aucun doute sur son potentiel, il fait preuve de retenu, avec mon expérience de l’année dernière, je sais que tout peut arriver, plus spécialement au energy lab, dit-il.
Le plus admirable est que ce duel avec Sebastian Kienle, les deux athlètes allemands sont des vrais amis et très respectueux l’un envers l’autre. Alors qu’il pourrait jouer la carte de la guerre psychologique, il préfère lui rendre hommage, c’est certain que Sebi me motive à en faire encore plus.
Et la course? Jan Frodeno est l’un des rares athlètes qui auront la possibilité de contrôler la course de l’avant. Contrairement à certaines éditions, on ne devrait plus voir de performance à vélo suicidaire comme Starykowicz (non qualifié) nous a habitués.
Au lieu d’annoncer son plan, Frodeno préfère dire qu’il devra agir en fonction des conditions et s’est juré d’être conservateur lors de la première partie du marathon.
Maintenant avec deux récentes performances, la grande question est de savoir si un athlète osera se mettre en travers de son chemin.
Kona est toujours imprévisible, non?