Plus fort que les « purs coureurs »…
Une image presque saugrenue ce dimanche dans les labours du Mans : dans la masse des coureurs en short débardeur, une tenue moulante, au style et aux couleurs chatoyantes, jaune, blanche, rouge et noire se détache… Cet athlète à la musculature saillante et robuste peu commune sur ce genre d’épreuve remonte un à un ses adversaires pour finir à une improbable 4e place et termine vice champion de France de Cross.
Vincent Luis a éclaboussé de toute sa classe une compétition promise aux spécialistes de la discipline et moi, je suis resté collé devant mon ordinateur devant une compétition que je suis toujours de loin en temps normal…
Et oui, avant ce week-end, pas mal de monde se demandait quel pouvait bien être le niveau réel d’un triathlète de top niveau mondial par rapport à des purs spécialistes d’une discipline comme la course à pied. J’avoue que j’ai été surpris et que je ne m’attendais pas à un tel résultat à l’arrivée… J’ai aussi été terriblement impressionné par la manière. Car Luis, dans sa remontée, m’a donné une sensation de maîtrise, de contrôle et de puissance assez incroyable. Quelle confiance et quelle assurance faut-il avoir pour se permettre de démarrer englué dans le peloton et remonter « tranquillement » près de 50 concurrents pour finir par déposer une athlète, Morhad Amdouni, avec des références chronométriques de très haut vol (3’34 au 1500m…).
Alors bon, en sport, il ne faut jamais s’enflammer, mais sur ce parcours de presque 12 kilomètres très boueux, Vincent a montré qu’il était devenu extrêmement fort dans un registre où, justement, il péchait encore un peu par le passé : la « caisse ». Car si le sociétaire de Sainte Geneviève des Bois est depuis longtemps intraitable sur distance sprint, face à des Mola, Brownlee ou Gomez au top de leur forme, jusqu’à présent, les 10 kilomètres étaient encore un peu long…
Plus vite, plus fort et plus longtemps… On peut se prendre à rêver d’une médaille, et pourquoi pas du plus beau métal le 18 août du côté de Rio.
Certes, nous n’y sommes pas encore et la démonstration de « super Mario » Mola ce week-end à Abu Dhabi, semble montrer qu’en cette année olympique, le niveau en course à pied pour viser une breloque va encore monter d’un cran par rapport à Londres… Mais Vincent est à maturité c’est une certitude. Suffisamment mûr et loin des blessures depuis un bon moment, notre espoir numéro un a plus d’un atout dans son sac, car, en définitive, il n’a plus de faiblesse au contraire de Mario ou même Richard Murray qui sont encore perfectible en natation.
Alors, avec un tel talent, quelle stratégie ?
La France a choisi de ne pas prendre de « domestique » pour Rio. Un choix à la fois évident et juste, car, au moins chez les garçons, nous disposons avec David Hauss, Pierre Le Corre, Dorian Coninx et Simon Viain d’athlètes de top niveau mondial… Un choix pourtant discutable de mon point de vue tant j’aimerais sentir notre leader « au chaud » avec auprès de lui un Anthony Pujades ou un Raoul Shaw dévoué à positionner Vincent au mieux et assurer le « non-retour » des meilleures gazelles du circuit avant T2… Imaginez-vous avec la force et l’assurance qu’à Vincent et en plus, le confort de se savoir secondé sur la partie cycliste…
Je sais bien, cela risque fort de ne pas être le cas… Je pense aussi que Luis à le potentiel de s’en sortir tout seul et qu’il est largement capable d’attraper sa médaille de haute lutte avec son unique force et son sens tactique… Mais il subsiste au moins une certitude : Les Anglais, au minimum, joueront la carte du collectif… Comme à Londres où ils avaient ramené deux médailles… Une stratégie qui n’est pas sûre mais qui a aussi fait ses preuves par le passé chez les Canadiens par exemple avec Simon Whitfield.
Franck Bignet a « le choix du roi » si on peut dire avec des athlètes dans le collectif olympique tricolore qui, de par leurs caractéristiques, peuvent permettre toutes les stratégies, toutes les options possibles…
Et finalement, parfois, avoir autant de talent à disposition, ce n’est pas le plus facile à gérer au moment de prendre des décisions qui risquent de s’avérer cruciales pour la destiné de notre équipe garçon… Parfois, des stratégies individuelles et des intérêts contradictoires au sein d’une même équipe sans leader désigné, peuvent conduire à l’échec…
Rio, c’est déjà la cinquième olympiade pour notre sport et la France, qui reste bredouille depuis seize ans, n’a jamais été aussi proche d’en attraper une…
Bon courage Mr le DTN !
Crédit photo : Trackandlife.fr