Ce week-end aura lieu Ironman 70.3 de Mont-Tremblant. Depuis 2012, la ville des Laurentides s’est imposée dans le paysage du triathlon québécois. Avec ce succès indiscutable, on se questionne toujours sur la place laissée aux autres.
Entre le rêve de prendre part à la course la plus populaire du pays ou de suivre les traces de Pierre Lavoie, les nouveaux pratiquants ne sont pas en majorité attirés par le triathlon, mais plutôt par le challenge que représente la distance Ironman ou 70.3 À l’image de ce phénomène québécois, le programme de Jimmy Sévigny (le défi Ironman) qui vante cette course comme l’expérience de votre vie. Rien de moins.
En présentant le sport comme un challenge ultime, il est associé à un sacrifice temporaire dans lequel l’athlète recherche une espèce d’accomplissement, mais aussi une reconnaissance des autres. Malheureusement, on voit des athlètes trop souvent de passage qui ne resteront pas dans le sport. Le noyau dur de ceux qui reviennent année après année est très mince.
Impossible d’instaurer une vraie culture et un savoir associé à notre sport, rien n’est approfondi et on n’exploite jamais le passé. L’omniprésence d’Ironman dans la belle province vient avant tout du fait que les autres courses n’ont pas su s’imposer. Il n’est pas le grand méchant à pointer du doigt.
Plusieurs bénéficient de sa tenue, mais ne l’oublions pas, même si le Québec a un long passé avec l’ITU, avec 2 Olympiennes à son compteur (Sam Mcglone et Kathy Tremblay) et avec la tenue des championnats du monde en 1999, des coupes du monde à Drummondville et récemment une course ITU PAN AM à Magog, tout est encore à faire.
L’intérêt des pratiquants pour le sport n’a pourtant jamais débordé vers l’élite. Le phénomène est très commun dans le sport amateur. Le partage du savoir ou l’instauration d’une culture mettant en valeur les élites dépend souvent des volontés internes des décideurs des clubs.
À force, cela a mis dans l’ombre un autre type de triathlon, celui qui touche les élites. Le Québec regorge pourtant de structures avec d’imposantes sections pour permettre aux plus petits de prendre part au sport et de rêver aux Jeux.
Plusieurs jeunes du club de Tri-O-lac sillonnent désormais le monde. Le Rouge et Or est devenu un pilier pour des athlètes avec un avenir international comme Alexis Lepage et Charles Paquet. La réussite est bien là.
Depuis plusieurs années, le travail de Triathlon Québec a permis d’accompagner nos jeunes afin qu’ils puissent continuer leur développement et briller sur la scène internationale. Amélie Kretz gagnait sa première coupe du monde (Edmonton) en étant à l’époque toujours basée au Québec. Cela a ouvert les yeux à une génération en démontrant qu’un Québécois pouvait aussi rêver plus grand.
À titre d’exemple, il y avait deux Québécois de moins de 23 ans lors de la dernière série mondiale ITU. Pas moins de 4 athlètes de la belle province au départ du dernier Grand Prix en France. Cette représentation est pratiquement identique aux autres grandes nations du triathlon comme l’Australie ou la Nouvelle-Zélande sur un championnat domestique qui a fréquemment rassemblé les meilleurs athlètes au monde. Charles Paquet a d’ailleurs fini premier junior lors de cette course (Valence – 15e élite).
Si cela n’est pas suffisant, le Québec devrait être la province québécoise la mieux représentée lors des prochains Jeux olympiques de Rio avec Sarah-Anne Brault et Amélie Kretz.
Ces athlètes, ainsi que Xavier Grenier Talavera et Alexis Lepage sont probablement plus connus par la scène triathlétique française que Québécoise. Le constat est dur, mais réel.
Malheureusement, on entend très peu parler de ces athlètes dans les médias locaux. À l’exception de certains automatismes comme celle d’être récipiendaire d’une bourse venant d’une grande institution ou la publication d’un communiqué de presse résumant sommairement le résultat d’une course, à l’image d’autres nations, la connaissance sur le triathlon olympique est très limitée.
Le constat est difficile, mais aucune chaine québécoise ne diffuse actuellement de triathlon alors que nos athlètes locaux n’ont jamais été aussi présents sur le circuit international.
De notre coté, on voit aussi que Trimes se connecte de moins en moins avec les Québécois. Notre interaction est nulle avec les autres médias plus généralistes et les organisateurs. Trimes ne reçoit aucun support des acteurs du triathlon au Québec. Il n’existe tout simplement pas d’écosystème. Pour être plus précis, on n’en fait pas partie.
On ne serait plus assez local. C’est pourtant en s’intéressant aux autres que l’ont peut mettre en valeur les athlètes d’ici en ayant plus d’éléments afin d’évaluer leurs performances.
On assiste à une émergence de talent au Québec dans une scène qui n’est probablement pas assez réceptive et qui ne veut pas voir plus grand. Pour poursuivre leurs rêves, les Québécois sont obligés de s’exiler en Europe.
L’arrivée de la coupe du monde ITU de Montréal pourrait changer les choses. Cet événement est synchronisé avec l’émergence de cette nouvelle génération locale.
À nouveau, elle pourra courir chez elle, face à un niveau de compétition qui lui est désormais habituel.
Tout est en place pour rejoindre une plus grande audience et utiliser cette plateforme pour créer un intérêt envers cette autre forme de triathlon qui se veut plus élitiste, mais aussi plus inclusive.
Ce triathlon se tiendra dans le vieux Montréal, soit le plus beau cadre que la métropole pouvait offrir. En voyant la popularité de la série mondiale de Leeds en Grande Bretagne, on exige que Montréal réussisse à devenir l’une de ces courses urbaines qui ne sera pas ignorée par ses locaux. Cela risque de prendre du temps et aussi énormément de travail. Seul un écosystème associé à une communauté peut générer un intérêt. Sans expliquer le contexte d’un événement, la curiosité fait rarement déplacer la foule.
La course montréalaise se tiendra alors que les Jeux olympiques auront déjà commencé. A seulement 1 heure du fuseau horaire de Rio, elle pourra être utilisée comme dernière étape préparatoire pour les JO.
Un challenge qui pourrait s’avérer être une force, le temps le dira, mais dans les petits dossiers de Trimes, on sait déjà que 5 Olympiens dont une ancienne médaillée seront de la partie.
Un événement international ne peut exister que s’il génère un intérêt qui dépasse le temps d’un week-end et pour cela, il faut rassembler tous les acteurs.