Cet article a été réalisé avec l’aide d’Alain Desgagné qui est professeur de statistiques à l’UQAM et passionné de triathlon. Dans cet article, il s’agit de parler du poids idéal d’un athlète, et plus universellement, du poids qui fait gagner les jeux olympiques ou Kona. Il y a donc deux poids idéaux :
Le poids idéal « personnel »
C’est le poids qu’il est possible d’avoir sur le court terme et pour lequel le corps d’un athlète donné est le plus performant possible. Obtenir ce poids consiste à diminuer au maximum son taux de gras, mais dans le cas des épreuves longues distances, comme le gras entre en action dans l’efficacité des articulations, et est une source d’énergie non négligeable pour les muscles et le cerveau dans l’effort d’endurance, il existe un compromis entre l’athlète pas assez gras qui fait une croix sur une source d’énergie importante, et l’athlète trop gras qui a un rapport poids/puissance trop bas. Ce compromis se situe aux alentours de 7% de masse corporelle graisseuse chez les hommes, et 15% chez les femmes. Ce poids là ne tient compte que du gras, et non pas de la silhouette musculaire.
Ce poids-là n’a pas vraiment d’intérêt dans cet article car il n’existe pas de formule pour le calculer. N’importe qui se situant vers 7% de gras est dans son poids idéal, et ce même poids idéal, pour deux athlètes de même taille, varie en fonction de la masse musculaire très variable d’un individu à l’autre.
Le poids idéal « universel »
« Universel » peut paraitre un peu prétentieux mais il fallait donner un nom à cette définition du poids. Il s’agit du poids idéal à très long terme. Il ne se base pas seulement sur un taux de gras, mais aussi sur l’efficacité de l’appareil musculo-squelettique qui doit se trouver dans un rapport poids/puissance idéal pour une compétition donnée. Ici, il s’agit donc aussi d’avoir la masse musculaire dans son pourcentage idéal, en plus de son taux de gras. Par exemple, si Arnold Schwarzenegger se pointait sur un Ironman avec un taux de gras de 7%, il serait dans son poids idéal personnel. Mais il serait très loin du poids personnel universel, car la quantité de muscles qu’il trimballe sur son squelette est très loin du compromis idéal pour bien performer sur un Ironman. En fait, Arnold a plutôt le poids idéal universel pour le culturisme.
Le poids idéal universel s’obtient donc en sculptant ou affinant les muscles aux cours des entrainements répétés, et ce en allant vers un ratio poids/puissance idéal. Si Arnold s’entrainait pendant des années à courir, nager et pédaler, il pourrait revenir sur son Ironman avec une forme plus proche du poids idéal universel pour le triathlon. Le poids idéal universel peut donc être vu comme un poids à atteindre à très long terme, voire qui ne sera jamais atteint si la génétique de l’athlète ne le permet pas.
Du coup, les personnes qui, aujourd’hui, sont le plus proche du poids idéal universel pour le triathlon sont les athlètes élites qui ont affiné et optimisé leurs appareils musculaires suite aux entrainements à répétition depuis des années. Mais ce sont aussi le plus proche de ce poids théorique car :
- Ils ont passé leur croissance à s’entrainer, et les muscles se sont développés à la puberté tout en s’adaptant parfaitement à la contrainte qui leur était imposée.
- Ils ont très certainement la génétique qui leur permet de se diriger vers ce poids idéal universel, puisqu’ils ont des résultats qui le prouvent.
C’est donc chez les élites que l’on trouve le poids idéal universel. Si on suppose que la distance n’entre pas en compte (un athlète qui passe de l’ITU à l’Ironman ne prend pas ou ne perd pas de poids, du moins, pas de façon visible), alors la seule chose qui va définir ce poids, c’est la taille de l’athlète.
L’objectif de cet article est d’établir une formule du poids idéal universel pour bien performer en triathlon, qui ne se base que sur la taille. Pour cela, on peut s’intéresser au poids et à la taille des athlètes qui ont fait les jeux olympiques de Londres, car au moment de leur compétition, on peut supposer que ces athlètes, les meilleurs au monde, étaient le plus proche possible de ce fameux poids idéal universel théorique.
Le graphe suivant est une loi (poids en fonction e la taille) établie à partir d’une vingtaine d’athlètes de triathlon masculins (et autant chez les femmes) aux JO de Londres.
On se rend compte alors que le poids des athlètes est remarquablement linéaire avec leur taille. A partir de ces courbes, la formule donnant le poids universel pour une taille donnée est :
- Poids en kg = 56.4*Taille en m – 34.8 (Hommes)
- Poids en kg = 56.4*Taille en m – 40.3 (Femmes)
Il y a donc une différence constante de 5.5kg entre un homme dans son poids idéal universel, et une femme de même taille dans son poids idéal universel, et ce pour toutes les tailles. Ces données montrent que l’IMC (indice de masse corporelle, soit le poids en kg divisé par la taille en m au carré) des athlètes de triathlon se situent entre 18.5 (grande taille) et 19.7 (petite taille) pour les femmes, et entre 20 (grande taille) et 22 (petite taille) pour les hommes, soit exactement entre les catégories « maigreur » et « corpulence normale » selon l’organisation mondiale de la santé. Le poids idéal pour pratiquer le triathlon à haut niveau est donc à la limite de la maigreur, ce qui ne va pas sans rappeler les athlètes élite de cyclisme.
Cette loi linéaire est aussi plus injuste pour les grands athlètes qui doivent se contraindre à un IMC plus petit que les petits athlètes.
Pour les tous les athlètes d’un niveau en dessous des jeux olympiques, il y a un intérêt non négligeable et connu à se trouver dans son poids idéal personnel pour les grandes occasions comme un championnat du monde groupe d’âge. A présent, il existe un nouvel intérêt avec ce poids idéal universel, qui est de surveiller année après année, si des changements physionomiques s’opèrent chez l’athlète, et donc si l’athlète se rapproche du poids idéal universel donné par la formule sur le long terme.
Bien sûr, il s’agit d’affiner sa silhouette tout en améliorant ses performances, signe que le ratio poids/puissance est sans cesse amélioré. C’est d’ailleurs une véritable science dans le cyclisme. Car bien entendu, l’idée est de s’approcher du poids d’Allistair Brownlee ou de Jan Frodeno afin de s’approcher (ou plutôt, d’être moins éloigné) de leur performances.
Il ne serait pas intéressant de connaitre l’écart-type aussi (malgré une taille d’échantillon +/- faible)?