Ce que l’on a appris > ITU Madrid, le triathlon comme on l’aime.

Dimanche matin, en regardant la coupe du monde de Madrid, j’étais particulièrement émotif. Lorsqu’on écrit des textes d’avant course, par la nature de cet exercice, on voit les courses ITU comme incroyablement prévisibles, par exemple, il ne faut pas être un génie pour prédire la domination d’une Carolina Routier dans l’eau…

Et pourtant, Madrid nous a offert un incroyable spectacle avec des moments rares… On vous explique…

Une coupe du monde pas coupe du monde…

Les courses en Europe sont souvent plus denses. Chez les hommes, on peut affirmer qu’une douzaine d’athlètes qui sont des réguliers en série mondiale étaient présents à Madrid. 

Contrairement au scénario habituel sur ce que l’on peut considérer comme le niveau inférieur de la série mondiale, on y voit fréquemment les favoris du jour attendre sagement la T2…

Madrid ne s’est pas du tout déroulé comme cela. Simon Viain et Léo Bergère ont été les grands animateurs de la journée à vélo. Au final, cela a créé une véritable course à l’usure et un groupe de 4 (Bergère, Viain, Coninx et Sissons) a finalement réussi à s’échapper pour sortir de la T2 avec une courte avance d’une dizaine de secondes. 

Gagner en expérience?

On a toujours eu le sentiment que les Français se doivent de courir plus. Cette course à Madrid est d’autant plus intéressante pour les Français puisque considérant la force à pied d’athlète comme Viain et Coninx, ils peuvent désormais se demander s’ils pouvaient obtenir un meilleur résultat sans attaquer à vélo. 

Si Bergère, Viain et Coninx nous ont impressionnés par leur audace, Raphael Montoya nous a aussi époustouflés par son intelligence de course. Sachant qu’il posait le vélo avec un retard en T2, il aurait pu abandonner tous ses espoirs de victoire. Il a pourtant remonté progressivement sur Simon Viain pour dicter l’allure.

Évidemment, dans son cas, il n’a pas effectué un vélo avec autant de panache que Léo Bergère, mais l’intelligence de course, c’est aussi cela. Savoir être patient et réussir à se préserver. Maintenant, n’oublions pas que le parcours vélo était très sélectif avec une côte et de nombreuses relances. Dans ces conditions, on ne peut pas totalement se soustraire de tous les efforts. 

Maintenant, si Raphael Montoya aime bien trainer à l’arrière de peloton, en obtenant un premier podium en coupe du monde sur un parcours aussi sélectif, il ne faut pas se tromper dans le jugement, il a couru intelligemment, point final. 

Dorian Coninx, 6e… ce n’est pas une déception…

En se plaçant dans l’échappé, Dorian pouvait apparaitre comme le grand favori. Il finit pourtant à la 6e place. Cela peut paraitre décevant, mais au final, il apprendra plus de ce résultat que d’un podium. Il faut flirter avec la limite pour la connaitre… Entre théorie et pratique, le triathlon reste un jeu où il faut investir assez à vélo tout en gardant assez de force pour courir. Dorian a un incroyable potentiel et il doit toujours apprendre à le maitriser. Une sorte de Jedi quoi…

Simon Viain… toujours studieux et réfléchi…

Le résultat qui nous a fait le plus plaisir, c’est celui de Simon Viain. Dans cette course au développement, il est facile de se précipiter. Simon a préféré retarder son retour sur le circuit. Il ne s’est pas présenté au premier GP de la saison. Autonome, il a tout planifié et à l’image de ce que l’on a vu, il semble progresser dans tous les secteurs… Si Simon fait troisième, on n’a pas le sentiment qu’il peut se reprocher grand-chose. 

Léo Bergère toujours avec audace.

Léo a fait un nouveau festival à vélo. Sur papier, un jeune de 20 ans qui tente de s’échapper seul à vélo, cela n’existe pas. Cela ne fait pas partie du monde moderne de l’ITU. Pourtant, il est impossible d’oublier sa présence en course. On s’est presque demandé s’il ne s’était pas mis au service des autres français.

Ce qui est dangereux avec cette attitude, c’est que cela vient créer des attentes chez ses adversaires. On peut d’ailleurs évoquer le cas de Kristian Blummenfelt. Reconnu comme un excellent cycliste et surtout, généreux dans l’effort, beaucoup comptait sur lui pour reprendre l’échappée. Au final, le norvégien a couru avec le réservoir totalement vide. 

Pour Léo, s’il est facile de croire que son succès passera par des progrès en course à pied, il doit surtout réussir à être plus imprévisible. S’il y a une satisfaction d’avoir un poids dans la course, il ne faut pas se soustraire à une réflexion sur sa stratégie. Léo termine tout de même 19e à cette coupe du monde. Il continue à bâtir sur du positif et c’est le principal. 

Pierre Le Corre si proche si loin. 

La 21e place de Pierre Le Corre est une déception. Malheureusement, le fait d’avoir de la difficulté à mettre ses chaussures de vélo lui a été fatal. Alors, derrière ce résultat, il n’y a rien de dramatique. C’est une question d’exécution et non un manque de forme. Pas la peine d’en faire un drame parce qu’on sait que ce type d’athlète peut rebondir rapidement. De plus, il revient d’une blessure (fracture causée par une chute deux semaines après Abu Dhabi). Dans le cas de Pierre, ce n’est pas une question de potentiel. 

Merci l’ITU. 

En regardant cette course, il faut savoir être reconnaissant et avouer que le parcours était tout simplement incroyable. Avec ce terrain de jeux, les risques de voir un vélo sans attaque sont presque nuls… De plus, cela faisait plaisir de voir autant de spectateur et même si Mola, Alarza ou encore Gomez ne se sont pas présentés à la course la plus importante sur leur terre…

La course était aussi diffusée sur la chaine olympique… Est-ce que cela sera à nouveau le cas?

Une belle unité française.

Le fameux moment rare, c’était de voir Coninx, Bergère Viain et Sissons se retrouver ensemble en échappée. Voir trois Français collaborer de la sorte peut sembler si naturel et pourtant… Il y avait quelque chose de fraternel. 

Mais surtout, cela nous a remémoré à quel point les Français pouvaient gagner en appliquant des stratégies communes. Le collectif doit gagner pour permettre à l’individualité d’atteindre des nouvelles marques. 

Chez les femmes, on voit aussi les Britanniques et les Américaines agir de la sorte… Malheureusement, si la France est en retard dans le domaine de la stratégie, on a observé un véritable changement à Madrid. Aussi chez les femmes, nos cinq Françaises ont roulé ensemble pour tenter de revenir sur la tête.

L’expérience qui gagne…

On avait presque oublié Ryan Sissons. Celui qui a été sous l’aile de Laurent Vidal s’est présenté à Madrid à son meilleur niveau. Cet Olympien était d’ailleurs l’athlète avec le plus d’expérience. Sa victoire s’explique tout simplement parce qu’il a su attendre son tour pour se joindre à la bonne échappée au bon moment, mais aussi faire preuve d’une grande patiente pour attaquer Raphael Montoya. On notera d’ailleurs que les trois hommes en tête en course à pied avec Viain, Montoya, il se placera en arrière, faisant croire qu’il était à la limite et incapable de dicter l’allure.  

Le retour ou la surprise Georgia Taylor Brown?

Ce qui est incroyable avec les nations fortes du triathlon comme les USA et les Britanniques, c’est que leur bassin ne semble jamais s’épuiser. La performance de Georgia Taylor Brown est annonciatrice de futurs succès en WTS. Une blessure a ralenti son développement ces deux dernières années, elle est à suivre de près. 

À noter que Georgia Taylor Brown enregistre la course à pied la plus rapide par une minute… mais aussi le vélo le plus rapide. 

Les Françaises si proches si loin acte 2.

La France fait un tir groupé avec Léonie Périault 7e, Cassandre Beaugrand 11e, Justine Guerard 12e, Sandra Dodet 13e et Mathilde Gautier 19e. Malheureusement, Audrey Merle a abandonné la course. 

Si ces résultats restent positifs, malheureusement, malgré un travail commun, elles perdent une minute à vélo. Elles ne sont toujours pas maitres de leurs sors. Il y a toujours cette barre à franchir. 

Léonie Périault signe le troisième temps à pied. Cassandre termine à une minute de la marque du jour. Cela reste très respectable considérant que c’était son second OD. 

Est-ce que la non-présence de Carolina Routier aurait pu totalement changer la physionomie de la course, c’est effectivement fort possible. 

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