Traduction en français de l’article
https://www.trainingpeaks.com/blog/how-to-nail-the-ironman-marathon
Le marathon est le moment où le rêve d’un Ironman idéal s’arrête. Il est extrêmement difficile de réaliser un marathon costaud après 180 kilomètres, et dans les faits, c’est rarement le cas.
Considérez l’exemple suivant de l’Ironman Arizona 2008 :
- Le temps vélo le plus rapide était 4:26:12
- Le 50ème temps vélo le plus rapide était 4:55:29 – 29 minutes et 12 secondes, soit 10,9% plus lent.
Comparez cet écart avec le même écart en course à pied :
- Le temps de course à pied le plus rapide était de 2:46:38
- Le 50ème temps course à pied était de 3:20:22 – 33 minutes et 44 seconds, soit 20% plus lent.
Comme vous pouvez le constater, sur la partie vélo, les 50 meilleures performances étaient très regroupées, tandis que sur la partie course à pied, elles étaient plus dispersées. Cette caractéristique apparaît dans chaque Ironman, et ce n’est certainement pas une preuve que la majorité des coureurs sont moins forts en course à pied qu’en vélo dans ce type d’évènement. Cette caractéristique est plutôt due au fait que les triathlètes commencent le vélo avec des jambes fraîches et que donc les cyclistes costauds sont capables de rouler à un niveau représentatif de leur valeur. Mais dans la course à pied, où les jambes fatiguées dès le début, la plupart des triathlètes échouent à courir à un niveau représentatif de leur aptitude. Ils explosent et perdent un temps énorme comparé aux quelques compétiteurs qui réussissent à tenir à leur niveau sur le marathon.
Voici donc quelques conseils qui vous aideront à éviter le cas typique d’une course à pied désastreuse sur le marathon d’un Ironman :
Ayez un niveau aussi fort que possible à vélo
Le premier Ironman Wisconsin, en 2002, comportait une innovation. Deux coureurs d’élite kenyans participèrent à l’épreuve. Je parle de marathoniens capables de courir le marathon en moins de 2h15. L’histoire dit qu’un coach les avait recrutés pour une sorte d’expérience. Toujours est-il que ces pauvres cobayes furent pulvérisés en natation et en vélo, mais qu’en plus, il coururent très mal. [NDT: plus d’infos ici]. Cet exemple unique démontre que la première chose pour réaliser un bon marathon n’est pas la capacité à courir mais d’être costaud en vélo.
N’est-ce pas normal après tout ? Votre niveau de vélo doit être tel qu’il vous permette de pédaler durement pendant 180km et que vous ayez encore du jus pour le marathon. Sinon la meilleure forme du monde pour la course à pied ne vous sera pas utile. Comment devenir si costaud sur le vélo ? Une réponse simple est de mettre un énorme volume sur le vélo. Mais la plupart d’entre nous n’avons pas le temps de mettre le temps adéquat pour faire ces kilomètres de vélo. Du coup, quel est le minimum à faire pour passer facilement ces 180 km ?
Visez quatre sorties vélo indépendantes de 160 km, deux en adossant deux séances de 4h et deux en réalisant une sortie sur la journée (d’environ 8 heures en allant aussi lentement que cela suffise pour y survivre). Toutes ces sorties vélo devraient avoir lieu dans les 10 semaines avant votre affûtage et, de manière évidente, dans les semaines précédentes vous devrez augmenter progressivement vos sorties longues pour atteindre les 160 km.
Courez long, mais ne courez pas beaucoup
Il peu paraître intuitif que courir beaucoup de kilomètres est une manière efficace d’améliorer vos chances de courir un marathon costaud sur l’Ironman ; mais en fait ce n’est pas le cas. Bien que vous deviez être assez en forme pour courir un marathon costaud, vous devez en fait faire le minimum de course à pied pour vous assurer d’être capable de faire un marathon costaud et d’allouer le reste d’heures d’entraînement disponibles pour construire une puissance en vélo qui vous permettra en fait de réaliser votre potentiel de course à pied.
Je recommande que même les triathlètes compétitifs sur Ironman ne réalisent que 3 séances de course à pied par semaine, la séance la plus importante étant la sortie longue du week-end. Réalisez au moins quatre sorties de 29 km dans votre entraînement pour construire une solide réserve d’endurance en course à pied. Mettez autant que vous voulez dans vos longue sortie (de manière raisonnée quand même), mais résistez à la tentation de faire plus d’en faire trop en course à pied durant le reste de la semaine pour que vous puissiez progresser dans ces longues sorties, sinon ça ne fera qu’augmenter vos risques de blessure et de burnout et vous éloigner du vélo.
Réalisez de nombreuses transitions course-à-pied
Dans un entraînement Ironman, 1,6 km couru juste après la sortie vélo en vaut probablement 10 km courus avec les jambes fraîches. Courir juste après le vélo vous prépare spécifiquement pour l’Ironman. Je crois fermement que réaliser ces courtes course à pied après le vélo est plus bénéfique d’en faire d’autres en dehors du vélo parce qu’il faut vraiment s’entraîner à enchaîner la course à pied après le vélo. Si vous pouvez commencer à courir solidement juste après le vélo, les chances que vous puissiez continuer solidement sont importantes. Et le contraire est aussi vrai. A l’inverse de purs marathons, les marathons d’Ironman ne tournent pas mal au 32ème km ; ça commence dès le départ.
Un deuxième avantage à cette approche – le premier étant son efficacité – est qu’elle n’est pas très stressante. Si vous roulez 4 fois par semaine, vous chercherez un maximum de 10km de transition en course à pied, avec 6,5km de ces km réalisés à l’intensité seuil. Ces nouveaux kilomètres vous feront plus de bien que si vous les incorporiez dans votre entraînement d’une autre façon.
Ne perdez pas votre énergie sur du travail de vitesse
De purs coureurs réalisent typiquement 2 séances de vitesse par semaine. De purs cyclistes réalisent typiquement 2 séances rapide par semaine. Plusieurs triathlètes essaient de réaliser 2 séances de course à pied rapides et 2 séances vélo rapides par semaine. Je ne pense pas que ça soit un bonne idée pour la préparation d’un Ironman. Le problème est que la fatigue du vélo se transfère sur la course à pied, et vice-versa, tant et si bien que réaliser 2 séances dures de vélos et 2 séances dures de course à pied est l’équivalent de 4 séances de course à pied dures par semaine. La fatigue s’accumulera et la performance de ces séances dures sera compromise.
Même pour les triathlètes qui le maîtrisent, un marathon sur Ironman est couru à une intensité relativement basse – à environ 60 pour cent de la VO2max [NDT: certains disent 61-65%, d’autres 68-69%, voire encore 70%]. Bien que des courses plus rapides puissent théoriquement stimuler des améliorations dans la capacité aérobique et dans l’efficacité de la foulée qui pourraient ainsi améliorer la performance d’intensité basse sur le marathon ironman, ces bénéfices théoriques sont balayés par le coût de la fatigue qui pourrait survenir en essayant de combiner une forte intensité de course à pied avec une forte intensité de travail vélo.
Je crois que les triathlètes préparant un Ironman gagneront à ne s’engager en haute intensité qu’en vélo ou qu’en course à pied, et généralement en vélo d’ailleurs. Réaliser 2 sorties vélo dures par semaine en plus d’une longue sorte vélo vous rendra plus fort sur le vélo et vous aurez probablement les jambes plus fraîches au début du marathon pour pouvoir tenir votre allure, laquelle, je le redis, ne sera particulièrement rapide pour aucun triathlète, et ce, du début du marathon jusqu’à l’arrivée. Et gardez présent à l’esprit que, si la fatigue se transmet du vélo à la course à pied, ce n’est pas pareil pour la bonne forme, bien que dans de moindres proportions. Donc vous pouvez compter sur ces séances dures de vélos pour également élever votre forme en cour à pied.
Je ne suggère pas d’éviter complètement de courir vite. Mais je suggère de vous limiter au minimum. En plus de séances de transition à l’allure seuil que je décrivais ci-dessus, vous pouvez aussi réaliser des sorties fartlek avec des accélérations de 30 à 60 secondes à allure de 5 km ou de 3 km au long d’une sortie à une allure modérée, plus de petits sprint en montées (8-10 sec) après que vous ayez réalisé vos sorties faciles en course à pied, et des progressions, consistant à réaliser 1,6 km sur 5 km en courant à une allure de 10 km à la fin d’une sortie de base ou une sortie longue.
Réalisez un Ironman métrique
Comme je l’ai suggéré ci-dessus, de courtes transitions de course à pied juste après le vélo vous prépareront à bien démarrer votre marathon d’Ironman, et quand vous démarrez bien, vous avez des chances de le finir bien. Cependant, une transition de 1,6 à 3,2 km ne prépare pas le corps à un stress équivalent à celui d’un marathon après un long et dur vélo. En fait, seule une longue sortie enchaînant vélo puis course à pied pourra aider à reproduire cela.
Quatre à cinq semaines avant votre Ironman, réalisez ce que j’appelle un Ironman métrique. Comme vous le savez, la distance d’un Ironman en miles est de 112 miles de vélo et de 26,2 miles de course-à-pied. Eh bien un Ironman métrique consiste à réaliser 112 km de vélo et 26 km de course à pied. Cela correspond aux deux tiers de ce que vous aurez à faire le jour-J, ce qui est parfait en terme de simulation du challenge à réaliser sur un Ironman sans pour autant trop affecter votre corps. Réaliser le vélo et la course à pied à l’intensité la plus proche de l’intensité de course Ironman. (Vous pouvez même commencer avec 2,4 km de natation si vous le souhaitez.)
Courir un marathon dans la foulée du vélo ne vous semblera pas si difficile une fois que vous aurez réalisé cet Ironman métrique.
Ne vous goinfrez pas en vélo
Plusieurs marathons d’Ironman sont ruinés par des problèmes nutritionnels, et neuf fois sur dix, le problème spécifique nutritionnel est de consommer trop plutôt que trop peu. Les triathlètes surestiment souvent la quantité d’aliments qu’il faut pour atteindre un Ironman et la quantité que leur corps peut absorber et utiliser.
Si vous pouvez absorber 60g de glucides et 750ml de liquide par heure sur le vélo, chose qui est très facile avec juste une boisson énergétique, vous devriez être ok. Peu d’athlètes peuvent absorber plus de 80g de glucides par heure [NDT: de récentes études telles que celle d’Asker Jeukendrup recommandent pourtant 90g et non plus 60g ou 80g]. Si vous êtes plus grand et que votre course a lieu lors d’une journée chaude, vous pouvez avoir besoin de 1 à 1,2 litre de liquide par heure pour prévenir un ralentissement lié à la déshydratation. Mais 80g de glucides par heure et 1 à 1,2 litre de liquide par heure sont encore beaucoup plus que ce que beaucoup de triathlètes peuvent consommer.
Une différence notable est que le corps peut absorber plus de liquide et de glucides durant le vélo que durant la course à pied, étant donné que l’estomac est plus secoué en course à pied. Ce qui arrive est que les compétiteurs s’alimentent autant que le permet leur corps sur le vélo, descendent du vélo et commencent à courir pour être pris de nausée, ballonnements voire pire. Donc prenez garde à ne pas dépasser votre prise d’aliments durant la dernière heure de vélo, pour que votre tube digestif ne rentre pas en rébellion au départ du marathon.
Article très intéressant.
Je suis loin d’être un grand triathlète (un inronman), mais il me semble que vous sous estimez (ou en tt cas vous n’en parlez pas) l’impact du mental dans cette épreuve du marathon d’ironman. La capacité à maitriser son discours interne et son attention le jour de l’épreuve sont des éléments essentiels dans cette épreuve d’endurance. Il est important de s’y entrainer.
Raphaël Homat (préparateur mental)
J’ai appliqué cette approche pour préparer IM Nice 2014. Peu de temps libre, infrastructures rares (j’habite Paris), 2 petites séances vélo en semaine, quelques séances de natation par-ci par-là, il ne restait que le weekend pour caser une longue sortie vélo (minimum 160km) et une longue càp (minimum 18km). Ça a bien fonctionné. Cette méthode insiste sur l’endurance fondamentale, et sur le cardio-vasculaire en corollaire. Effectivement, qu’est-ce qu’un Ironman sinon de l’endurance ?… N’espérez pas battre des records ou obtenir un slot pour Kona avec cette stratégie, mais elle aidera définitivement à réussir son IM dans de bonnes conditions.
Autre point: la nutrition. La 1ère cause de baisse de performance ou de la fatigue en course est la DESHYDRATATION. N’ayez pas peur de boire trop, le surplus partira dans les urines. Pour la quantité de glucides à absorber, on peut augmenter la dose sur le vélo (80~100g/h selon les personnes) parce que l’estomac n’est pas soumis à des secousses comme en càp, mais surtout car le débit cardiaque disponible pour la digestion/absorption des sucres est supérieure en vélo (ie FC plus basse), permettant ainsi de faire passer plus d’énergie vers les muscles.
Quant à la forme (solide/liquide), c’est personnel. J’ai couru IM Nice uniquement sur du liquide, après avoir essayé beaucoup de choses (barres énergétiques, sandwiches, salé, sucré,…): aucune crampe d’estomac. Revers de la médaille: le goût du sucré pendant 10h peut vite être lassant, pensez à varier les saveurs…