Chaque année, je me dis qu’il faut que j’essaye de faire un Gran Fondo. Le projet tombait toujours à l’eau parce qu’il y a cette croyance que cela est une interruption dans la fameuse préparation du triathlète.
Le week-end dernier, j’ai finalement fait le pas en participant au Gran Fondo de Mont-Tremblant. Comme son organisateur me l’avait bien mentionné, cela n’est pas une course mais plutôt un défi, soit de rouler à 160 km à 30km/h de moyenne.
Pour le triathlète moyen, un Gran Fondo reste un objet roulant non identifié. Il y a toujours cette peur face au fameux cycliste compétitif… Celui qui te regarde et semble te juger, celui qui te fera rapidement comprendre que tu ne respectes pas leurs règles.
Enfin, le Gran Fondo, cela n’est justement pas cela. D’ailleurs, symboliquement, tout le monde doit porter le même maillot, tout de suite, on perd la notion de la meute et du club… Dans ce cas, on est un ensemble qui devra se soumettre à des règles, soit de suivre les quatre encadreurs à l’avant.
La notion de l’exclusif ou il faut se faire accepter dans un groupe en adoptant leurs méthodes et justement remplacé par celle de l’inclusif ou le groupe doit s’adopter à tous.
Et la sélection? Elle est naturelle, un cycliste moins endurant ne devrait naturellement pas s’inscrire à la distance de 160 km. Dans le Gran Fondo, il y a une voiture-balai. Si le cycliste n’est vraiment pas capable de suivre le groupe, il pourra alors terminer le parcours par ses propres moyens. Contrairement à une course sur route, ces cas sont très rares. Le niveau reste accessible et demeure intéressant pour tous.
À l’image de Tremblant, tout est à la lettre, à l’heure, super sécuritaire et parfaitement organisé. Rouler dans un peloton avec 200 cyclistes est une expérience unique. Si certains pensent que cela n’est pas sécuritaire, cela est une remarque cynique, mais je préfère encore me faire mal à vélo entre nous que par un automobiliste.
Malgré l’appréhension de certains, il n’y a pas eu ces fameuses chutes reliées au fait qu’il faut rouler en peloton. Dans les faits, personne ne vous demande réellement de rouler serré. Le plus important dans cet exercice, c’est de rester prévisible dans ses actions et de tenir sa ligne que cela soit dans les courbes ou les segments plus droits.
Les deux chutes que j’ai vues étaient sans gravité. L’une était très caractéristique au Gran Fondo. Dans les montées, les cyclistes augmentent l’allure… les niveaux ne sont souvent pas identiques, certains n’ont pas le même équilibre… Alors, certains se touchent et tombent.
Maintenant, l’aspect qui peut paraitre irritant, c’est qu’il faut très souvent freiner afin de permettre à ceux qui sont en arrière du groupe de revenir sur la tête. Descendre à 70km/h dans la route du Nordet ou tout juste avant une montée détonne…
Mais cela ne gage pas l’effort total pour faire les 160km, au contraire.
Ce qui est le plus agréable dans cette expérience, c’est de pouvoir emprunter des routes fermées temporairement et encadrées par la police. De plus, deux arrêts à environ 70 et 125 km pour se ravitailler sont au programme. Dans ces zones, on y retrouve de la boisson, de la nourriture, des mécaniciens et des toilettes.
Tremblant regorge justement de trésors comme le chemin du Nordet ou le secteur de Kanata avec ses routes sinueuses et impeccables. Les paysages et le type de routes sont variés. Les 160 km sont en phases progressives. Le début est très roulant, rouler à 36 de moyenne sans vraiment forcer fait office d’apéritif, puis plus progressivement, le plat principal avec des ascensions comme celle du chemin du Nordet. Dans la dynamique, cela reste quand même nerveux, les relances dans les virages sont poussées et tout le monde veut démontrer ses talents de grimpeurs.
Même si pour moi les 160 kilomètres ne représentent pas ce fameux défi ultime, le Gran Fondo demeure un effort appréciable parce qu’il faut pédaler et tenir sur une bicyclette pendant 6 heures…
Maintenant, si l’on ne doit pas parler d’une course, à l’image de la culture Strava, il existe deux segments chronométrés. Dans le cas du Mont-Tremblant, cela correspondait à des efforts en montée mixte pour une durée d’environ 5 minutes. Assez pour se tester et juger de son niveau avec les autres. D’ailleurs, d’après ma compréhension, pour ceux qui recherchent plus de vitesse, il fallait s’inscrire à la distance du 120km pour une allure à 34km/h.
Cela m’a permis de satisfaire mon coté compétitif… et d’y trouver un équilibre. Le Gran Fondo est une sorte d’hybride entre une sortie très longue avec des amis et l’expérience d’une course dans un événement d’envergure.
Le succès actuel pour ce type de course se comprend facilement puisqu’il annule certains désagréments de la pratique du triathlon… Pour cette épreuve, certains faisaient le choix de se présenter le matin et partaient tout de suite après et d’autres profitaient de Tremblant durant les trois jours du week-end. Je jalouse cette flexibilité.
Cette participation m’a permis de me rendre compte de plusieurs aspects. Un triathlète qui s’entraine pour un 70.3 ou ironman devrait sans conteste inclure ce type de course dans sa saison. Cela vient justement casser cette fameuse monotonie de l’entrainement seul et surtout, cela permet aux triathlètes de profiter de sa forme pour voir autre chose. Contrairement à la course à pied, une longue sortie de vélo ne vient compromettre la suite de son entrainement.
Mais ce que j’ai surtout apprécié dans cet événement, c’est le sentiment d’inclusion de partager un moment avec d’autres. La grande différence, c’est qu’après la course, il n’est plus possible d’avoir ce sentiment d’insatisfaction parce que l’on n’a pas réussi le temps qu’on voulait. Le Gran Fondo, c’est justement une pratique sportive ou l’on doit apprécier le moment présent et le fait d’être actif. Évidemment, tout cela ne signifie pas que certains ne tombent pas dans un certain matérialisme…
Dans mon cas, l’expérience est concluante et j’espère retenter rapidement l’expérience Gran Fondo et j’espère bien retourner à Tremblant l’année prochaine.