La Tendinite Achilléenne et l’Excentricité

Cet article n’a pas été écrit par un médecin mais juste par un triathlète amateur qui a été plusieurs fois confronté à cette pathologie. A prendre donc comme une réflexion personnelle plutôt qu’une recommandation d’un professionnel de la santé.

L’activité physique est décrite comme « le médicament miracle, qui améliore la force et l’endurance, donne des muscles et des os en bonne santé, aide à contrôler le poids, à réduire l’anxiété et le stress, à augmenter l’estime de soi, à augmenter la concentration et l’attention, à améliorer les niveaux de pression sanguine et de cholestérol, à améliorer les performances académiques, le tout gratuitement et sans danger même pour les enfants.  » (source: www.mysportscience.com).

Super, se dit le triathlète car je pratique trois activités sportives ! Eh bien non, pas toujours ; parfois le mieux est l’ennemi du bien. A force d’efforts intenses et répétés, surgissent certains maux comme la fameuse tendinite d’Achille. L’appellation proviendrait du cas d’un infortuné champion grec nommé Achille lors des guerres de Troie, ce qui suggère que ce mal existe depuis la nuit des temps. Quelques siècles plus tard, cette satanée tendinite frappe toujours les athlètes, notamment en triathlon (ex. Léo Bergère, Hervé Faure, Andreas Raelert…). Et pour savoir à quelle période de l’année survient le plus souvent cette blessure, un data scientist tel que Seth Stephens-Davidowitz vous inviterait probablement à regarder les statistiques enregistrées par les moteurs de recherche.

Pour ceux qui ont la chance de ne pas la connaître, décrivons rapidement la sensation qu’engendre cette tendinite. Elle se manifeste par une gêne ou douleur modérée à vive sous le mollet. Typiquement, la tendinite arrive sans prévenir avec une gêne survenant lors d’un entraînement qui dépote ou lors des premiers pas matinaux juste à la suite d’un ou plusieurs gros entraînements. Et si les grosses séances continuent, s’ensuit un pincement de plus en plus douloureux ; le tendon devient plus raide avec souvent apparition progressive d’un nodule sur la zone douloureuse. Si le triathlète peut généralement nager ou pédaler en ne ressentant qu’une gêne, il peut vite lui devenir impossible de courir, le tendon subissant trop de sollicitations par rapport à ce que son état lui permet de soutenir.

Pour ceux qui au contraire la connaissent, leur hantise est qu’elle surgisse à l’approche d’un objectif majeur non reportable à l’instar d’un Liu Xiang lors de « ses » J.O. à Pékin 2008 ou plus communément à l’instar d’un triathlète amateur inscrit sur un triathlon longue distance sans possibilité d’annulation. Se pose alors la question de comment guérir le plus vite possible. Il faut alors mettre en oeuvre trois actions :

  • Identifier et fixer la cause (ex. nouveau matériel récemment utilisé, suite d’entraînements trop stressants, déplacement d’un pied lors d’une chute, ou autres) ;
  • Eradiquer pour un temps les séances qui sollicitent trop le tendon (dur dur à accepter) ;
  • Éteindre au plus vite l’inflammation démarrée (eh oui, mais comment procéder ?).

Deux piliers sous-jacents à l’activité physique viennent immédiatement à l’esprit en matière de guérison : le sommeil et la nutrition. S’il ne semble pas exister d’études sur l’influence du sommeil sur la tendinite d’Achille, il est cependant reporté que le sommeil influe sur la récupération du corps en général (ex. comment le manque de sommeil influence votre performance). Côté nutrition, en revanche, les recommandations alimentaires sont nombreuses (ex.  Denis Riché, Santé Magazine, Au revoir aux tendinites, MySportScience: Gélatine…). A défaut de certitudes sur le pouvoir exact de telle quantité de sommeil ou de tel ou tel aliment, autant suivre la plupart de ces recommandations et éviter trop d’excentricité dans ces deux domaines, chose qui aidera le corps et ses tendons à être plus détendus. Ceci est intéressant en préventif, mais malheureusement insuffisant pour la guérison une fois la tendinite d’Achille déclarée.

Le problème dans l’identification d’une méthode de guérison de l’inflammation est de s’y perdre tellement les remèdes proposés sont multiples : glace, étirements, alternance de bains chauds bains froids, électrostimulation, massages… Et plus on lit d’articles sur le sujet, plus on trouve tout et son contraire.

Voici cependant deux sources récentes qui essaient de faire le tri dans ces méthodes :

  • Une liste de Jill Cook (résumée aussi dans un poster de Yann Le Meur) indique 10 choses à éviter : adopter un repos total, faire des étirements passifs, faire des injections, ignorer la douleur, étirer le tendon, masser le tendon, s’inquiéter de l’aspect du tendon, s’inquiéter de sa rupture possible, vouloir reprendre trop vite, ne pas faire de discernement entre les charges d’entraînement trop traumatisantes et celles acceptables pour le tendon blessé.
  • En se basant sur les rapports scientifiques et les bonnes pratiques, le site de Steven Low passe en revue la plupart des méthodes possibles et les classe en 5 catégories :
    • Celles qui empirent la tendinite : prise de cortisone et corticoïdes ;
    • Celles pour lesquelles il n’y a pas de preuve de succès : ultrasons, anti-inflammatoires non stéroïdiens ;
    • Celles dont les preuves de succès sont faibles : plasma, laser, injections, étirements, massages manuels, acupuncture, suppléments alimentaires ;
    • Celles dont les preuves de succès sont modérées : ondes de chocs, chirurgie;
    • Celle dont les preuves de succès sont importantes: travail en excentrique.

Ainsi, les médicaments ne sont  pas recommandés. S’ils soulagent la douleur de la tendinite à court-terme, en revanche ils en retarderaient la guérison. Et à masquer la douleur, le risque est que l’athlète poursuivre les entraînements comme si de rien n’était, que la douleur réapparaisse et donc que la tendinite – qui n’avait pas disparue – soit encore pire après, c’est à dire plus développée, plus douloureuse et plus longue à guérir.

Deux traitements sont rapportés comme modérément efficaces (i.e. dès fois ça marche, d’autres fois non) :

  • La chirurgie, mais le temps de convalescence n’est pas indiqué et les images de peignage incitent à trouver une méthode plus douce et moins risquée.
  • Les ondes de chocs qui, si réalisées suffisamment tôt, permettent de rendre sa souplesse au tendon. La méthode est de taper dessus, un peu comme on tape sur les ormeaux pour les détendre et les rendre moelleux. Par contre, pour le sportif vivant dans un désert médical, obtenir des rendez-vous pour les traitements médicaux peut prendre autant de temps que d’attendre les très grandes marées. Autant dire que sa compétition phare risque d’être passée avant d’en avoir bénéficié.

Au final, le traitement rapporté comme le plus efficace (60 à 80% de succès)  consiste à solliciter le tendon en excentrique, par exemple avec le protocole de Stanish ou d’Alfredson. Son grand avantage est qu’il est gratuit et faisable soi-même à domicile. Ce type d’exercice se révèle également intéressant en préventif pour ceux qui sont chroniquement sujets à ce genre de problème car il permet aussi de vérifier si le tendon est en forme ou pas. En ce domaine, l’excentricité est donc de rigueur !

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