Reprise > Ce muscle qu’on ignore, le coeur.

Si vous fréquentez régulièrement les grands événements sportifs, vous devez savoir que les accidents cardiaques ne sont pas des légendes. Face à ces fatalités, on évoque souvent des problèmes d’hydratation, de stresse, ou encore une malformation. D’ailleurs, après un accident, les médias lanceront un débat d’un jour sans grande réponse…

Alors, la grande question face à ces malaises cardiaques est la suivante, est-il possible de déceler des anomalies avant un accident. Être performant et en forme ne signifie pas que vous n’êtes plus à risque.

On a questionné plusieurs urgentologues pour savoir s’il est possible de déceler un problème dans notre cœur. Malheureusement, il n’y a pas de certitude. Pour faire court, certains tests pourraient aider à déceler des anomalies, mais il est toujours impossible de garantir qu’un athlète est hors de danger.

D’après certaines lectures, il y a une donnée qui est assez intéressante. Si vous faites un effort intense, voire maximal, coupez votre effort, en 1 minute, votre coeur ‘en santé’ doit être en mesure de descendre d’environ 40 BPM, une personne qui ne descend que de 12 BPM ou moins en 1 minute devrait s’alarmer et aller voir un spécialiste.

Un coeur, comment ça marche? C’est exactement comme un moteur, plus il est réactif, plus il est en forme, il doit être capable de monter et de descendre très rapidement en régime.

D’ailleurs, certains athlètes avertis utilisent le HRv, soit la variabilité de votre cœur. En mesurant l’oscillation de votre coeur, cela permet de vérifier son état de forme/fatigue. Si sa périodicité (écart entre chaque battement) est identique, votre coeur a perdu de sa réactivité (fatigue, maladie) et si votre coeur est irrégulier, vous êtes en grand forme, signe de réactivité.

Malheureusement, cette donnée est influencée par de nombreux facteurs extérieurs, comme la chaleur où votre niveau de stresse du moment. Le HRv est donc une donnée difficilement interprétable.

Mais ce qu’il faut en retenir, c’est que le coeur devrait être traité comme un muscle, et cela n’est pas vraiment le cas.

Même si nous avons tous une ceinture cardiaque, rares sont ceux qui étudient vraiment leurs données puisqu’un athlète bien entrainé n’imagine jamais que son coeur puisse être un limiteur. Avez-vous déjà entendu quelqu’un dire, je ne ferai pas cet entrainement, parce que je ne veux pas trop solliciter mon coeur? On porte attention à ne pas trop solliciter notre corps pour éviter les blessures, mais le coeur?

Durant vos premières sessions, vous pouvez aussi vérifier votre découplage cardiaque. C’est un excellent outil pour mesurer votre endurance. Sur un effort constant, faites le rapport de la puissance/votre bpm pour la première partie et la deuxième partie de votre session. Si votre découplage est de plus de 5% sur un effort de type endurance, cela signifie que votre base n’est pas encore solide. On reviendra prochainement sur le sujet.

Il y a quelques saisons, une étude du Dr Éric Larose, affirmait que courir un marathon pouvait provoquer des dommages importants au coeur. Le ventricule gauche du cœur a 17 segments. Le stress occasionné par la course d’un marathon peut facilement endommager un ou deux de ces segments. L’autre côté du cœur tente alors de prendre en charge et d’exercer la fonction de la zone endommagée.

Évidemment, il faut relativiser ces données en fonction du niveau athlétique de l’individu.

Justement, un athlète qui sort d’une coupure de plusieurs semaines s’avère souvent impatient de retrouver sa forme de course. Il faut pourtant se munir de nouveaux repères en redéfinissant vos zones d’entrainements.

Recommandations.

– L’intensité doit se faire par petite période (Fartlek).
– Redéfinissez vos zones.
– Surveillez votre découplage cardiaque. Augmentez la charge uniquement quand votre découplage est inférieur à 5%.
– Respectez un échauffement progressif.

 

19 commentaires
  1. En gros, il y a deux types de gens à risque :

    -Les jeunes (sans maladies cardiaques) en forme, athlétique qui ont une anomalie cardiaque, plus souvent une Cardiomyopathie hypertrophique. Je dis souvent mais il faut nuancer. Ce sont dans les causes les plus fréquentes de mort subite chez les jeunes, mais il reste que ce sont des événements rares, mais dévastateur

    -L’autre groupe sont les gens qui ont maladie coronarienne, dû au vieillissement, tabac, diabète, etc et qui ont un coeur à risque de faire un infarctus ou un arrêt cardiaque.

    Il y beaucoup de littérature sur la détection des malformations cardiaques chez les athlètes. L’Italie s’est doté d’un programme de dépistage avec des échographies chez leurs athlètes de hautes performances. Il y eu des études, dont une récemment qui regardait seulement si faire un ECG, une bonne histoire et un examen physique était « cost-effective » et il semblerait que oui.

    Ce que je pense, est que les athlètes de haut niveau (reste à clarifier où est la ligne) devraient aller voir un Médecin et se faire dépister selon leur histoire, examen et un ECG s’ils ont des facteurs de risques.

    1. Entièrement d’accord, tout athlète de haut niveau devrait tirer profit au max du sytème de soins de santé. Un bête bilan sanguin annuel (pas en relation avec le sujet de cet article) peut révéler un début d’anémie, des carrences en vitamines / minéraux etc…

      Y a beaucoup à grater de ce côté ne serait-ce que pour faciliter la performance. Pousser un peu plus loin en sollicitant des tests à l’effort? Encore mieux selon moi.

    2. Merci Eric, Ton commentaire est exactement ce que je cherchais.

      J’aimerai savoir ce que tu penses des dommages que l’ont peut faire a un coeur après un effort. A quel point faut il prendre cela au sérieux?

  2. Superbe article Alex! Merci!

    Quelques pensées dans le désordre:
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    En général, la science en ce qui a trait la physiologie de l’exercice en générale supporte d’avantage la médecine que la performance. Autrement dit, la litérature disponible est bien plus étoffée pour tout ce qui concerne trouble (actuel ou potentiel) du domaine médical que pour supporter les coachs et athlètes dans leurs quêtes pour les meilleurs méthodes d’entraînement.
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    Les études sur l’impact de l’activité prolongée sur le coeur ne font pas exception. Y a pas mal de données disponible à ce sujet. La plupart tombe dans 1 ou l’autre des 2 catégories suivantes:
    – Statistiques (échantillon à large échelle)
    – Clinique (échantillon à bien plus faible échelle)

    La combinaison des 2 permet généralement de se faire une idée. On reprochera aux études cliniques leur trop faible nombre de sujets (souvent moins que 30n), et aux études statistiques de ne pas être suffisamment invasives.

    Voici 2 petits exemples d’études cliniques:
    http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/19505796
    http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/20815809

    Dans les 2 cas, on détecte bel et bien des changements sur la façon dont le coeur opère suivant un marathon, mais on attribue ces changements à une surcharge s’étant produite au niveau cardiaque et non pas à des domages s’étant produits à ce niveau.
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    On a parlé énormément du cas du Marathon. J’peux pas m’empêcher de m’interroger au sujet du cas des Cyclosportives ainsi que bien sûr, du cas de la Moyenne et de la Longue distance en triathlon. Après tout un IM se termine par un Marathon.
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    J’m’interroge également sur ce qu’aurait été la vie de ces malheureuses victimes si elles avaient choisi un style de vie plus pépère. Autrement dit, est-ce que ce Marathon qui leur a été fatal est vraiment la cause de l’écourtement tragique de leur vie?
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    Énormément de gens se gourent pendant le Taper, phase que je compare à l’atterissage d’un avion. Et souvent en effet, enfin l’erreur que je vois le plus souvent être commise c’est une coupure trop importante surtout lorsque le volume pré-taper n’est pas très significatif (ie, tu t’entraînes 30-40k semaines en prep à un Marathon, et en plus tu Tape sur 3 semaines car t’as lu sur Internet que c’est ce qui marchait le mieux).

    Bon. Assez écrit. Merci Alex.

    Charles

    1. En fait, je pense qu’il y a tout un savoir qui devrait être plus abordé sur les coeurs… on nous parle de nutrition… d’exercices pour ne pas se blesser etc… mais jamais rien sur les coeurs.

      Je crois aussi que le taper est responsable de certains soucis.

      1. Je me souviens d’un médecin du service de médecine sportive de l’hopital Purpan à Toulouse lorsque j’y faisais ma spécialisation sport qui n’arrêtait pas de répéter qu’il faudrait passer des examens spécifiques (cardio, tests d’efforts, hyperbar, …) tous les 1 ou 2ans pour les athlètes amateur et tous les 3 à 6mois pour les grands compétiteurs. Et ceci sans prévoir de différences entre l’âge, les sports (endurance ou explosif).

        1. L’hyper-barre, je connais moins. Qu’est-ce qu’il faisait au juste?

          JE ne pense pas que chaque 3-6 mois ça vaut la peine, mais si un athlète a un souffle, il faut faire une échographie.

          Sinon, un ECG chez les athlètes à risque à chaque année. Il existe des critères bien définis qui sont accessibles sur le site de la NCAA.

          Éric

          1. Eric, est-ce que tu veux ecrire un article pour nous?

            J’aimerai beaucoup savoir la procedure pour se faire checker et qui est le plus compétent pour cela.

            Aussi, nous expliquer les bases. Ce qu’un athlète peut et devrait surveiller.

          2. Wow, ce serait super de vous écrire un article

            Mais en gros, la ncaa et certains organismes ont des critères, il suffit juste de les lire et, pour la science, de les analyser!

            Sur quoi au juste? Il y a tellement de sujets en medecine…
            Vous voulez que je ponde ça en combien de temps? Deux semaines? contacter moi sur Facebook, ça serait plus perso!

    2. Bon point par rapport au taper. Beaucoup de gens font un taper sans avoir de phase de surcharge avant…
      Est-ce qu’un mauvais taper est dangeureux pour le coeur? Je trouve que c’est fort intéressant!

  3. Pour répondre à ta Alexandre, je n’ai jamais rien vu sur les dommages cardiaques après un effort, surtout car je ne m’étais jamais intéressé à la question.

    Les deux articles que Charles a mis sont intéressants car ils montrent une élévation des marqueurs cardiaques. Ce qui veut dire qu’au point microscopique, les cellules du coeur, ont à un point ou un autre du marathon, souffèrent et ont été dommagé au point de relâcher des « tropos ». Il faut comprendre que c’est comme une balance entre l’apport (Hémoglobine, oxygène, sucre, etc) et la demande (effort grandement augmenté par le marathon en cours), et que la demande a été plus grande et les cellules du coeur ont écopé de tout ça.

    L’apport peut etre diminuer parce que l’artère est plein d’athérosclérose et le sang se rend moins bien.
    Une autre manière que le coeur peut souffrir chez un coeur en santé, me fait rappeler quand j’ai passer un test de VO2 max et que ma saturation baissait près de l’effort maximal. Ce qui veut dire que mon coeur n’était plus capable d’avoir un bon débit cardiaque pour nourrir mes tissus périphériques. C’est l’acidose, mais c’est aussi le fait que mes tissus manquent d’oxygène et éventuellement mon coeur…

    Dans tes articles Charles, ils parlent des marqueurs cardiaques comme étant altérés, mais les tests d’imagerie restent Normaux. Ce qui ne me surprend pas. Car s’il y avait eu des changements à l’échographie ou l’IRM, et bien, on aurait parler d’un infarctus et le pt aurait été mort ou à l’urgence!

    Donc,
    Dommages microscopiques : marqueurs élevés
    Mais pas assez pour faire changez de quoi à l’imagerie sinon patient mort.

    Mais bon, on s’entend que s’il y a des changements micro, les gens sont pas mal à risques de mort subites.

    Éric

    1. Sans avoir fait d’analyses exhaustives Eric, j’ai l’impression que la science s’inquiète beaucoup moins que la population en générale des effets néfastes potentiellement encourus par la pratique extrème de sports d’endurance (quelqu’ils soient). J’ai également l’impression que la combinaisons études statistiques à grande échelle / études cliniques fournit très peu de motifs à la communauté scientifique de s’inquiéter.

      Dans le sport du Triathlon, au meilleur de ma connaissance, malgré la présence d’un Marathon probablement performé dans des conditions beaucoup plus stressantes pour le coeur, c’est d’avantage dans l’eau que les gens décèdent le plus souvent.

      Par ailleurs, sans avoir fait de recherche, j’ai l’impression que les ultra-distances sont d’avantage scrutées à la loupe (e.g. Triple à Deca Ironman, 100k course, Brevets Cyclistes etc).

      Au net, il demeure bien plus dangereux de rester assis dans son sofa que de sortir courir un Marathon, même si malheureusement on peut pas spéculer sur ce qu’aurait été la vie (espérence, qualité) des pauvres victimes si elles avaient privilégié un mode de vie sédentaire plutôt qu’actif.

      Merci!
      Charles

  4. Bonjour,
    je suis tout à fait en accord avec la distinction faite en fonction de l’âge et des facteurs de risques cardiovasculaires par Eric.

    En France des recommandations ont été établies par la société française de cardiologie et sont soutenues par la SF de medecine du sport à ce niveau, je les cites car elles me semblent concretes et peuvent servir à chacun de nous :

    – pour les jeunes sans facteurs de risques cardiovasculaires les recommandations sont :
    « un ECG de repos à partir de 12 ans, lors de la délivrance de la première licence, renouvelé ensuite tous les trois ans, puis tous les 5 ans à partir de 20 ans jusqu’à 35 ans. »
    Il est en effet facile d’éliminer avec un simple ECG de repos une DAVD ou un syndrome de Wellens qui sont les causes les plus frequentes dans ce type de situations avec les hypertrophies du VG.

    – pour les plus âgés ou les personnes avec des facteurs de risques CV (tabac, diabete 2, dyslipidémies(cholesterol et/ou triglycerides élevés), hypertension artérielle) :
    « c’est d’avantage la place de l’ECG d’effort qui doit alors être discutée. »
    Pas de consensus ici mais les accidents sont des infarctus du myocarde dans 90% des cas à la suite du détachement d’une plaque d’athérome formée à cause de l’âge et des facteurs de risques CV qui va boucher une des coronaires (artères irriguant le coeur).

    – pour les sportifs de haut niveau la prise en charge et plus rigoureuse avec généralement épreuves d’effort et écho cardiaques annuelles selon les fédérations.

    Tout ne peut pas être évité mais une partie non négligeable des accidents sont détectés grâce à ces tests en France. Des recommandations du même genre doivent exciter au Québec. Le problème réside dans le fait que les recommandations sont souvent suivies par les médecins du sport mais pas toujours par les médecins généralistes (qui ne peuvent pas être à la pointe dans tous les domaines). D’où l’intérêt d’orienter et de ne pas négliger la consultation de non contre indication à la pratique du sport donnant le droit à la licence (du moins en France).

    Lien des recommandations pour ceux qui veulent en savoir plus :
    http://www.sfcardio.fr/recommandations/sfc/contenu-du-bilan-cardiovasculaire-de-la-visite-de-non-contre-indication-a-la-pratique-du-sport-en-competition-entre-12-et-35-ans/preview_popup/file

      1. un médecin que j’ai vu tout récemment à qui j’en glissait un mot me disait qu’à moins que mon jumeau homozygote ait fait une infarctus (vive l’humour de médecin!) ils ne font à peu près pas de tests au public au Qc.

        raison donnée, ça fait trop de faux-positifs à gérer … puis quand t’as un faux-positifs, puis qu’il meurt devant toi dans un test ce n’est pas drôle (pour ce bout là, je n’ai pas trop compris ni c’était quoi le test qui pouvait te tuer, ni si c’était encore de l’humour de médecin, alors je n’ai pas trop posé de questions).

        mais c’est le genre de truc auquel un médecin sportif est probablement plus sensible … pour un médecin régulier au Québec, un possible trouble cardiaque c’est comme une douleur qui apparaît derrière le genoux après une heure de course … ça ne fait pas partie de la réalité à laquelle il a été formé à répondre …

  5. Je peux vous parler de mon expérience, j’ai du être opéré pour une réparation de la valve aortique en septembre à Ottawa. J’avais aucun symptôme, un médecin a trouvé par hasard mon problème. Comment? Avec son stéthoscope. Deux mois plus tôt un médecin généraliste me signait une autorisation de participation au marathon de Paris, lui il n’avait rien entendu…(pour x raison je n’ai pas pris le départ du marathon de Paris, toute une chance pour moi)

    Pour les problèmes de valve, le meilleur conseil que je peux vous donner, demandez à votre docteur de bien écouter votre coeur. Un test d’effort avec électrocardiogramme ne démontre pas ce type de problème.

    Selon mon chirurgien, mon mode de vie d’athlète est la source de mon problème. Il est vrai que j’ai pratiqué plusieurs sports depuis mon jeune âge et toujours dans un contexte de compétition.

  6. En effet la prise en charge au Québec à l’air differente.

    Après si vous allez dans une structure de medecine du sport ou chez un cardiologue un ECG de repos est facilement réalisable voire un épreuve d’effort. En plus pour l’épreuve d’effort vous aurez de multiples paramètre utiles pour cadrer entrainement et compétition : VO2max, PMA (si ergocycle) VMA (si tapis), Seuil Ventilatoire 1 et 2…
    Un bon médecin du sport est capable d’éliminer beaucoup de faux positifs sur un ECG de sportif, pas tous certes, mais le Bénéfice/Risque à été évalué par des experts.

    Je comprends qu’il puisse y avoir une limite financière à ces examens mais ils permettent de s’entrainer plus sereinement, et il est préférable de prendre soins de son coeur comme il est dit dans cet article plutôt que de craquer sur du matériel dispensable (cependant, ça m’arrive aussi…).

    Pour le souffle de Martin en effet le stéthoscope est le meilleur examen et fait partit des compétences de tout médecin spécialiste ou non.

    Les pathologies sportives de ce type c’est un peu comme toutes les maladies graves, on a tendance à penser que ça n’arrive qu’aux autres

    En tout cas, merci pour cet article très pertinent