Pour arriver en forme sur la ligne de départ, en particulier sur une épreuve longue distance, il peut être intéressant de s’aider du graphique de gestion de la performance (Performance Management Chart, PMC) de TrainingPeaks, graphique qu’on trouve aussi sous formes légèrement différentes dans GoldenCheetah et Strava. Nous en avons déjà parlé à maintes reprises (ex: ici), mais sans jamais lui dédier un article complet, c’est l’occasion de réparer ça.
La particularité de ce graphique est de montrer l’évolution de 3 indicateurs clés liés à l’entraînement : la fatigue, la forme et le fitness. Il permet à l’athlète (ou/et à son coach) non seulement de visualiser la montée en puissance au fur et à mesure des entraînements réalisés mais aussi de prédire l’évolution des prochains jours, permettant ainsi de bien gérer la période critique d’affûtage pour arriver sur un pic de forme à une compétition phare. Ainsi, sur la ligne de départ le jour-J, l’athlète pourra être confiant qu’il arrive à son top de forme sur l’épreuve… Bon certes, il reste après à faire la course, la réaliser au bon tempo, bien s’alimenter, être prêt à affronter de possibles surprises…
Le « comment ça marche » est simple : si vous enregistrez chacune de vos sorties natation, vélo, course-à-pied…, TrainingPeaks lui calculera un indice de stress, indice exprimé en TSS et qui est proportionnel au carré de l’intensité de l’effort et à sa durée (cf. détails). Cet indice représente par conséquent la charge d’entraînement de la sortie. A titre d’exemples, un indice de stress de 100 TSS représente une heure à bloc en nat’, vélo, ou cap ; un indice de 280 TSS représente un score d’effort idéal sur la partie vélo d’un Ironman. Grâce à cet indice, TrainingPeaks dérive quotidiennement 3 autres indicateurs:
- La fatigue, qui est évaluée par la charge d’entraînement moyenne des 7 derniers jours (exprimée en TSS/jour, cf. ATL pour les détails de la « moyenne »)
- Le fitness, qui est évalué par la charge d’entraînement moyenne des 42 derniers jours (exprimé en TSS/jour, cf. CTL pour les détails de la « moyenne »). Il représente la charge d’entraînement que réalise quotidiennement l’athlète sur les derniers jours, bref il représente la caisse actuelle.
- La forme, qui est évaluée comme la différence entre le fitness et la fatigue (cf. TSB). Si elle est supérieure à zéro, c’est que vous devriez être en forme ce jour-là. Si en revanche elle est négative, vous ne serez pas sur un pic de forme car vous avez encore trop de fatigue. La forme représente donc la fraîcheur qu’aura normalement le coureur.
Ainsi, après chaque entraînement, le graphique affichera un nouveau point de stress qui va augmenter la (courbe de la) fatigue mais celle-ci diminuera vite les jours qui suivent et vous n’en serez que plus fort ; au fur et à mesure des séances, vous aurez la (courbe de la) caisse/fitness qui augmente. Par contre, si vous avez une bonne caisse mais que la fatigue n’a pas eu le temps d’être dissipée par l’organisme, vous ne serez pas frais, vous n’aurez pas une bonne (courbe de) fraîcheur/forme.
L’exemple du graphique ci-dessus montre l’évolution des 3 indicateurs pour un triathlète ayant repris l’entraînement en novembre (fitness de 25 TSS/j), ayant augmenté petit à petit l’intensité puis le volume jusque début mai (fitness de 120 TSS/j) en vue d’un Ironman fin mai. Le valeurs relevées s’arrêtent le 10 mai et le graphique montre en lignes pointillées l’évolution de sa condition physique s’il ne s’entrainait plus du tout. Dans ce cas, tous ses futurs points de stress seraient à 0, la fatigue diminuerait ainsi très vite, tandis que la caisse/fitness diminuerait juste un peu, et du coup la courbe jaune en pointillé montre que le pic de forme aurait lieu 15 jours plus tard soit le 25 mai. Bien-sûr il ne faut pas couper totalement l’entraînement sinon la caisse/fitness diminuerait trop, mais la puissance psychologique de ce graphique est d’inciter un athlète stakhanoviste à en faire le moins possible lors de l’affûtage pour garder une forme la plus grande possible et arriver avec un maximum de fraîcheur le jour-J. (D’ailleurs, si vous voulez avoir une encore meilleure idée des 3 valeurs finales de fatigue – forme – fitness, vous pouvez programmer à l’avance les dernières séances d’entraînement prévues jusqu’au jour-J ainsi que leurs TSS estimés, et TrainingPeaks en tiendra compte pour ajuster les 3 courbes en conséquence.)
Mais attention de ne pas vouloir augmenter exagérément son fitness. En effet, en analysant les entraînements de triathlètes longue distance, le coach Alan Couzens a constaté que les maladies et blessures représentent plus de la moitié des échecs, et que le facteur qui y contribue le plus est une trop grande charge d’entraînement. Il estime que lorsque le fitness dépasse la valeur critique de 120 TSS/j, un triathlète a 5 fois plus de risques de se blesser que la moyenne. Ainsi ce mot vertueux de « fitness » n’est plus adéquat quand la charge d’entraînement chronique devient trop grande, il faudrait le renommer en « surentraînement« . En tout cas, ce qu’il faut retenir, c’est qu’il ne faut pas chercher à atteindre un « fitness » exagéré. Il faut rester confiant que, même avec un fitness modéré (ex: 50 TSS/j), la méthode fonctionnera également, qu’avec un bon affûtage, vous pourrez sortir dix fois plus de TSS d’un coup le jour-J et atteindre la finish-line.
Alan Couzens a également observé que ce concept de « fitness » sur la base exclusive du TSS ne fait pas tout, que des athlètes avec un moindre TSS/j pouvaient être plus performants le jour-J que des triathlètes avec un meilleur TSS/j. Mais cela nous mène à investiguer l’aspect performance ; il y aurait alors à analyser encore plus de détails, chose pour laquelle des coachs et/ou des logiciels d’entraînement dernier cri peuvent aider.
Bien-sûr d’autres évènements externes à l’entraînement peuvent influer au dernier moment sur votre fraîcheur le jour-J. A ce titre, nous vous recommandons la lecture de la check-liste des 5 choses à ne pas faire de Brett Sutton (avec si besoin une petite aide de deepl).