« Ton dossard, ton dossard! Arrête toi! Là! Maintenant! Tout de suite! »
C’est un peu abasourdi que je tourne la tête et fais face à un passager de moto prenant à cœur sa mission de la plus haute importance : faire en sorte que tout un chacun finisse la course avec un dossard nickel , lisible et surtout bien placé.
La mission est sacrée et certains à défaut d’avoir fait carrière comme huissier la prennent à cœur.
Retour en arrière: il est environ 9h30 dimanche dernier, le Vercorsman premier du nom a été lancé depuis une heure par vague de 20 coureurs dans une eau fraîche ascendant froide et la sortie de l’eau s’est faite sous une belle drache d’automne.
D’entrée de jeu la sortie de l’eau après T1 annonce la couleur par une bonne patate qui va nous remettre le poil dans le bon sens et nous emmener au pied du Col de la Machine pour une belle et longue boucle dans le Vercors avec quand même 3000m de D+.
Mais voilà, visiblement il y a un problème avec mon dossard, qui malgré les 3 points de fixation (spécificité tricolore) pendouille lamentablement dans mon dos comme une feuille à une branche fin Octobre. Vu les cris du passager motard et le brandissement du redouté carton jaune je m’exécute , m’arrête et pose le pied à terre.
Rebelotte… « Ton dossard, ton dossard ! ».
Pour les novices il faut quand même rappeler qu’en triathlon sur le vélo on est identifié par un bracelet indétachable avec notre numéro , un sticker sur le casque avec notre numéro , une plaque de cadre avec notre numéro et une puce électronique faisant le lien avec notre numéro… Ça fait quand même ceinture + bretelles et même après 31 ans de triathlon j’ai jamais vu un gars qui arrivait à interchanger sa tête , ses jambes et son poignet en cours de route.
Chez nous on rigole pas avec le dossard, c’est un peu comme la messe en terre Bretonne , un truc sérieux.
Et pourtant notre sport souffre de bien d’autres maux que d’avoir des athlètes avec un dossard mal placé ou chiffonné ou même déchiré. J’ai personnellement franchi la ligne d’arrivée de Kona sans dossard (pfuiitt envolé dans les champs de lave) et hormis en France cela n’a jamais fait monter la tension d’aucun arbitre de voir un athlète sans ce bout de papier fragile et ridicule.
L’obsession est telle que même la sortie de T2 est impossible sans montrer dossard propre et en ordre et qu’à de multiples points sur le parcours il me sera rappelé de « remettre mon dossard » sans compter sur un dernier contrôle en entrée sur le tapis finish « Ton dossard ! Devant! ».
J’ai eu beau essayer de trouver depuis plusieurs années la réponse à cette obsession du dossard à la Française mais rien, nada. Alors pourquoi continue-t’on systématiquement à vouloir mettre un point d’honneur et d’ennui à la position et la qualité du dossard?
Pourquoi n’utilisons pas plutôt les forces en présence à effectuer un contrôle strict des règles de courses? Drafting? Dépassement par la droite? Propreté?
Tiens parlons-en de la propreté justement!
J’étais dans la 2ème vague de 20 donc au pire il y avait 39 coureurs devant moi à la sortie de l’eau , et pourtant dès les premiers KM il y avait des papiers de barres , des gels , des emballages divers et variés. Comment peut-on pratiquer un sport nature dans un cadre exceptionnel comme souvent et s’abaisser à balancer ses détritus ?
C’est un scandale et il est peut-être temps que plutôt que de perdre du temps a vérifier nos points de fixation de nos dossards, un inventaire de notre nutrition soit fait comme sur certains trails avec sanctions à la clef.
Évidemment que sans arbitre il n’y a pas de course possible mais il est peut être temps qu’au niveau fédéral une refonte des règles et un assouplissement de cette ineptie soit faits pour que nos arbitres puissent enfin se consacrer aux vrais problèmes qui rongent notre sport et qui certainement entravent son développement bien plus que de finir une course avec un dossard pendouillant ou de travers.
Pour finir, cette première édition du Vercorsman qui ne fut pas réellement bénie des dieux niveau météo a été une vrai réussite en terme d’organisation. Le parcours long et sinueux était parfaitement sécurisé , le support à la traversée des villages un vrai réconfort et le professionnalisme des organisateurs du niveau de grosse machine type Challenge.
Bravo vous avez fait un super boulot malgré encore une fois des conditions tirant sur le Dantesque.